Rue indienne

Désordre et cacophonie.

Le fragile piéton, condamné à la poussière du bas-côté, zigzague pour éviter d’innombrables obstacles : badauds en contemplation, vieillards trébuchants, animaux, résidus de caoutchouc séchant au soleil, tiges de fer surgissant du sol ou parpaings oubliés. Sans cesse exposé aux véhicules contraints de quitter la route pour échapper à une collision, il avance néanmoins d’un pas tranquille et s’autorise de nombreuses incartades, totalement imprévisibles, sur la chaussée.
Ce faisant, il bouleverse l’itinéraire du cycliste qui s’applique à avancer le plus vite possible en prenant garde de ne pas se faire heurter par une moto pétaradante chevauchée par une famille entière, papa au guidon, un enfant posé sur le réservoir, maman à l’arrière, en amazone, le pan du sari au vent et bébé dans les bras.

La moto tangue et se faufile pour éviter l’auto rickshaw qui, pouet pouet tut tut, trace sa route à grand bruit, plein à ras bord de passagers et de marchandises.
La voiture le double fièrement, son conducteur, faussement nonchalant car soucieux de ne pas abimer la carrosserie, joue des pédales et agrippe son volant.


Arrive le maître de la rue, l’autobus, lui seul peut rivaliser avec le camion qui passe en cahotant dans un nuage de poussière.

L’autobus s’arrête où bon lui semble pour débarquer ou embarquer une nuée de passagers : adolescents en uniforme sortant de l’école, femmes chargées de paquets, hommes au lunghi remonté sur les cuisses.

Dans la rue indienne, c’est très simple : le plus gros fait la loi !

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