Small Things Productions

2007

Quand les mots anciens ne se forment plus sur la langue, des mélodies nouvelles surgissent du cœur; et là où les vieilles pistes ont disparu, un nouveau pays se révèle avec ses merveilles.

Rabindranath Tagore, "Gitanjali"

LES TEXTES:

(CHENNAI ET TAMIL NADU)

Chennai, enfin

Kollywood Party
Chennai, d’un set à l’autre
Johny, un garçon positif
Johny : de la difficulté à être musulman
journée à Madurai : chez Mohammed (1)
journée à Madurai : chez Mohammed (2)
Une soirée à Madurai

(PONDICHERRY et MAHE)

14 juillet à Pondicherry
Pondicherry, les gens
Les gens de Pondy : Jean-Michel
Les gens de Pondy (suite)
D'autres gens de Pondy
Ah les filles, ah les filles
La nouvelle Pondy
Mahe, une perle au bord de la rivière noire
Mahésiennes et Mahésiens
Mahe, d’un lieu de culte à l’autre
Quitter Mahe

(KERALA)

Kaippattoor au quotidien
Chez Roy à Keerithodu
Un dimanche à Ernakulam
Souffrir dit-elle
Mon dentiste préféré
La casa delle mamme : la rencontre
La casa delle mamme : Happyland
Namaste : l’école des handicapés
La casa delle mamme : deux noix de coco fraîches…
Casa delle mamme (suite) : les Sims
Namaste : Dix petits indiens
Namaste : au cirque

(ON THE ROAD)

De Chennai à Kaippattoor
De Kaippattoor à Pondicherry
Inde, 60 ans d’indépendance
Je craque ?
Rentrer

 

LES PHOTOS:

Ranganathaswami Temple in Trichy
Mahe: la rivière et les fleurs
Mahe: people and culture
Chennai d'un set à l'autre
Pondicherry: Peter, Flora et les autres
Pondicherry: marché aux poissons
Pondicherry: le marché
Railways: de Angamali à Trivandrum
Happyland avec "la casa delle mamme"

LES VIDEOS:

Mahe, une perle indienne
Jogging in Pondicherry
Fisherman in Pondicherry
Une nuit à Pondicherry
Défilé in Pondicherry
Happyland et la casa delle mamme

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" Kollywood Party "

Au Tamil Nadu le cinéma tient une place essentielle et tout peut arriver, y compris se retrouver en train de participer au tournage d’un film en compagnie d’un des plus célèbres acteurs du sud de l’Inde, c’est ce que nous avons fait il y a quelques jours.
L’industrie cinématographique indienne est florissante, en dehors de Bollywood, que l’on commence à découvrir en France, existent d’autres studios, propres à chacun des états et qui produisent eux aussi leur lot de bluettes sentimentales kitchs ponctuées de danses et de chants, de films d’action et de comédies.

La production Tamil, nommée Kollywood, est une des plus fécondes, et des meilleures. Certes, on y voit encore beaucoup de petits moustachus quadragénaires (au moins) et bedonnants séduire en en clin d’œil et un déhanché ravageur, de ravissantes créatures de vingt ans drapées dans des voiles vaporeux, mais ce n’est qu’un aspect, réducteur, de ce cinéma qui compte parmi ses réalisateurs l’excellent Mani Ratman, auteur de films touchants ou le réalisme se mêle à la poésie pour dénoncer des problèmes de société (voir le bouleversant Bombay) et dont les actions se déroulent souvent dans des milieux campagnards, ensoleillés et colorés, accompagnées de musiques rythmées et envoutantes, comme celles de Rahman.
Parmi les grands acteurs tamils quinquagénaires, deux sont des stars : Rajini, l’éternel jeune premier danseur et charmeur et Kamal Hassan, le séducteur ténébreux. C’est avec ce deuxième que nous avons fait, il y quelques jours, nos débuts dans le cinéma !
Repérés par un rabatteur de figurants qui avait besoin de « western people », amusés par la perspective, curieux de découvrir de l’intérieur les studios de Kollywwood, nous avons sans trop hésiter accepté la proposition.
Donc à l’aube, chapeautés par Peter, qui s’est improvisé notre agent, notre petit groupe (Flora, Fabio et moi), accompagnés de Pierre et Tobias, sommes montés dans un gros 4x4 envoyé par la production (s’il vous plait !) pour aller à Chennai. Deux heures de route et à l’arrivée au studio, un continental (ou presque) breakfast, dans une sorte de bas amphithéâtre en plein air, légèrement ombragé et envahi par les herbes folles et les broussailles.
Puis l’attente en compagnie des autres figurants, sans avoir la moindre idée de nos prestations futures.
L’attente.
L’attente.

Au bout de deux heures, quelques uns d’entre nous sont appelés par l’assistant. Tobias nous revient bientôt en strict costume sombre, chemise blanche et cravate, des lunettes noires sur le nez. On lui a assigné un rôle de garde du corps.
Il rapporte aussi des nouvelles sur le tournage. Kamal Hassan, l’acteur principal et réalisateur du film (à très gros budget), intitulé « Dasavatharam » (Dix caractères) interprète pour cette scène le rôle de Georges Bush. Il doit arriver en hélicoptère entouré de ses vigiles.
Et nous ?
Une rumeur nous apprend que nous serons des scientifiques américains.
Tandis que, réfugiés à l’ombre des arbres nous mijotons lentement, sûrement et interminablement, un assistant nous appelle les uns après les autres pour nous costumer. C’est ainsi que nous voyons apparaître un superbe pilote d’hélicoptère et d’autres gardes du corps.
C’est mon tour !
On me tend un pull à col roulé rouge, idéal en cette canicule et un coiffeur (il n’y a que des hommes) m’enfonce sur le crâne une courte perruque noire bouclée qui me donne immédiatement un petit air d’américaine des années cinquante.

Puis Fabio revêt une chemise et une cravate et l’attente continue.
Enfin, arrive Kamal Hassan, effectivement grimé, de façon plutôt ressemblante en Georges W.
Nous ne savons toujours pas ce que nous sommes censés faire.
Tout est prêt pour la scène de l’arrivée en hélico. Vrombissement d’un ventilo géant. Salut au garde à vous du pilote, interprété de manière irrésistible par un anglais très sympathique et plein d’humour, déploiement des vigiles, dont Tobias.

Il est une heure, la perruque me semble définitivement collée sur mon crâne surchauffé et je baigne dans le pull rouge, en espérant que cet effet sauna réussira peut-être à éliminer le kilo superflu qui s’est déposé sur mon ventre au Kerala grâce aux soins culinaires de la maman de Sini.
Deux heure, notre heure de gloire est arrivée !
Et quelle heure de gloire !
Flora, Pierre, Fabio et moi, affublés de blouses blanches, faisons partie d’un groupe de scientifiques américains, qui placés en demi cercle derrière G.W.B. applaudissent sans réserves à un discours qu’il prononce.
Un vrai discours, sa voix, et Kamal Hassan, impeccable, mimant ses expressions, et nous, opinant du bonnet, la mine solennelle, soulevés par la grandeur des paroles présidentielles qui promettent de lutter, pour la grandeur de l’Amérique et pour six millions de dollars contre les affreux terroristes.
Evidemment impossible de dire « Excusez-moi, je ne suis pas d’accord avec ce qu’il dit là… »
Donc toute honte bue, un hypocrite sourire patriotique sur les lèvres, tandis que Kamal Hassan, dégouline sous son maquillage, et que ma peau rosit sous la lumière des projecteurs, pour la somme de 1000 roupies (20 euros, ce qui est énorme par rapport aux salaires locaux), j’applaudis un discours, dont chaque parole me rebute.

Mais, bon, c’est du cinéma !

Malheureusement, le tournage étant top secret, impossible de photographier le set.
Mais, une photo de Kamal Hassan, prise en cachette.

     
Small Things Productions

2007

Claudine Tissier & Fabio Campo