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Le coup des parapluies

 

C’est la première matinée à Namaste. Nous participons à l’activité ambiante en traduisant pour les sponsors les lettres des enfants qu’ils aident. Ceux-ci rédigent leur missive en malayalam. Laquelle est tout d’abord traduite en anglais par un des membres du staff, puis en italien par moi. Les finesses stylistiques des auteurs n’en finissent pas de se perdre, mais l’essentiel, identique dans toutes les lettres, subsiste : remerciements pour les aides, assurance de s’appliquer à l’école, actualité familiale (malheureusement souvent douloureuse) désir de rencontre avec le sponsor, prières, your lovely…
Pendant que je m’évertue à transformer de l’anglais en italien sans déranger Fabio (qui filme le staff en action) toutes les deux minutes, une réunion se prépare dans le bureau voisin ; je remets mon labeur à plus tard et pars en observation.
Valeria a convoqué ce matin un groupe de femmes de Poonthura dont les enfants sèchent souvent la « Tuition school ». Elle les reçoit en compagnie de quelques collaborateurs.

Ceux-ci font aussi office de traducteurs car les femmes parlent en malayalam. Avant d’entrer dans le vif du sujet Valeria laisse les femmes s’exprimer. Elles sont inquiètes car leurs maris pêcheurs vont souvent au Tamil Nadu où sévit depuis peu une étrange maladie qui serait, d’après leur source, due aux fosses communes où ont été enterrées les victimes du tsunami. Pris de fortes fièvres les malades souffrent de douleurs articulaires et il y a déjà eu quelques décès.
Regards interrogateurs entre les membres du staff.
Je me souviens alors avoir lu dans l’Indian Express de la veille que des cas de Chikunkaya avaient été signalés dans le sud de l’Inde. J’en fais la remarque à Valeria. Une fois traduite elle se révèle pertinente car un des éducateurs se rappelle avoir déjà entendu ce nom là.
Je fais spécifier que la maladie est transmise par les moustiques et qu’elle a fait des ravages dans une île française où il n’y a pas de fosses communes.
Soupir de soulagement de l’assistance.

Valeria passe à l’offensive. Elle explique que l’école est fondamentale, qu’on ne peut la manquer que si on fournit un certificat médical et que pas d’école = pas de sponsors. Ensuite elle aimerait bien savoir le pourquoi de ces absences intempestives.
« C’est à cause de la pluie ! » s’exclament les femmes.
« Qu’à cela ne tienne, rétorque Valeria imperturbable, Namaste offre un parapluie à tous les enfants ». Bien vu le coup des parapluies, les mamans en restent coites. Pas pour longtemps, elles ont des revendications : deux uniformes scolaires par an au lieu d’un, des chaussures, un compas pour les petits aussi… « Pas question, répond Sasikala, ils n’en ont pas besoin à l’école, c’est du gaspillage ! ».
Enfin les mamans déplorent que certains sponsors réclament des lettres de leurs enfants alors qu’eux-mêmes ne sont pas fichus d’envoyer trois lignes de temps en temps. Les enfants sont déçus et finalement rechignent à écrire.
Valeria leur donne entièrement raison, elle est déjà intervenue auprès des sponsors et promets de récidiver de manière plus explicite.

Les enfants de Poonthura

La réunion se poursuit par diverses doléances, entre autre une concernant une sœur de « l’English médium » qui aurait réclamé de l’argent pour des livres alors que Namaste les a déjà achetés.
Valeria s’assure que les mamans rencontrent souvent les professeurs de la « Tuition School » et qu’un suivi pédagogique est effectué.
La séance se termine dans la bonne humeur, je retourne à mes traductions, en espérant que cette fois les sponsors auront la bonne idée de répondre, et la journée continue.

(… à suivre)

India, le 22 aout 2006

Vidéo: Les enfants de Namaste - Photos: Namaste: Les Photos
Site Web : www.namaste-adozioni.org
   
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Claudine Tissier & Fabio Campo