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29.10.2006

France / Italie

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Samedi soir, sur les collines bolognaises.

Attablée avec nos amis devant les restes d’un délicieux dîner, concocté tous ensemble au fil de l’après-midi, entre deux ballades dans la campagne et des verres de vin blanc frizzante, l’esprit embrumé par diverses délicieuses vapeurs, j’écoute sans écouter tout en écoutant suffisamment pour pouvoir intervenir dans la discussion de temps à autre, et mes pensées vagabondent, laissant les idées s’enchaîner librement les unes aux autres.

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Cet après-midi nous avons ramassé des châtaignes, rousses dans leurs bogues piquantes. Je me suis d’ailleurs enfoncée un piquant sous l’ongle du pouce, qu’il m’a fallu extraire, tout doucement entre deux ongles et sans mes lunettes. A peine retirée l’écharde intempestive, une belle, grosse et luisante châtaigne me lançant des signaux tentateurs, j’ai plongé une main aveugle dans un massif de sournoises petites orties : « Aïe, les garces ! Puttana Eva, qu’est-ce que ça fait mal… »
Passé le frénétique et inutile secouage de la main touchée, il m’est venu à l’esprit que je n’avais pas ressenti cette brulure depuis… tellement longtemps. Je suis restée là, immobile, à contempler la rougeur se répandre sur le dos de ma main en pensant aux orties de mon enfance et la douleur s’est estompée, elle a rejoint la catégorie « petits bobos liés à des instants de bonheur ».

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Et voilà que maintenant Valerio, l’élu local de Rifondazione Comunista, s’endort dans un coin du canapé, comme un Bouddha repus et satisfait. Patrizia débite l’une après l’autre des saillies hilarantes et moqueuses qui font éclater de rire l’assemblée. Au bout de la table, à ma droite, Renato raconte à Gianni son séjour à Manaus, sur le Rio Negro, il a vu un dauphin rose. « Moi aussi, dit Elisa, réalisatrice de documentaires en s’asseyant à côté d’eux, j’en ai vu cinq ! ». Puis elle chante la chanson de Lula, et tous espèrent que celui-ci sera réélu.
Marinella et Marzia se régalent de « cantuccini»  (biscuits secs aux amandes) trempés dans du vin blanc liquoreux. Fabio, Barbara et Fiorella échangent des souvenirs d’un temps où ils étaient plus proches, Stefano regarde danser les flammes de la cheminée, la tête de Luna, sa chienne, tendrement posée sur ses genoux.

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J’aime être entourée de ces Italiens cultivés, chaleureux et rieurs, italiens du nord, différents de Fabio et de ses amis du sud, exubérants et démonstratifs, différents de moi aussi. Parfois nos références se rejoignent, parfois non. Surtout quand Fiorella évoque la révolte estudiantine de Bologne, en 1977, dont certains d’entre eux ont été des leaders. Ils parlent de leurs amis exilés en France, comme Marzia et Renato pendant les années 80, et des dernières perquisitions qu’ils ont dû subir. Ils ont à peu près mon âge, mais nos vécus sont différents.

De me voir seule française du groupe me rappelle, par une de ses merveilleuses associations d’idées qui me ravissent et dont j’aime à dénouer les enchevêtrements, la finale de la dernière coupe du monde de foot.
Nous étions à Pondichéry, avec Marzia, Renato et Giulia, leur fille, et nous avons suivi le match dans le jardin d’un restaurant français.
Une centaine de français, dont certains ont fait preuve d’un chauvinisme exacerbé, quatre italiens et une dizaine de serveurs indiens qui soutenaient l’équipe italienne.

Qui soutenaient l’équipe italienne ?
Et oui !
Pas les bleus, à part Zidane qui est un héros.
Les Italiens !
Les sympathiques Italiens, ceux de la pizza, des glaces et des spaghettis bolognaise, habilement diffusés dans le monde entier.

Pendant que nous Français, dispensions au fil des siècles la pertinence de notre pensée, nos idées hautement élaborées sur la philosophie, la religion et les droits de l’homme et nous posions sans complexe comme les penseurs du monde, nos amis Italiens, sur les traces de Marco Polo, exportaient leurs richesses culinaires et leur savoir faire, commerçaient avec un incommensurable talent.
Certes, ils ont aussi construit des églises d’une beauté bouleversante, bercé le talent de Michel Ange, de Botticelli, et de Léonard de Vinci et donné naissance à Dante, mais ça, l’Indien moyen s’en fiche complètement, question œuvres d’art, il a ce qu’il faut chez lui.
Ce qu’il sait, l’Indien moyen, c’est que les Italiens sont sympathiques et bons vivants et que les français, somme toute, sont un peu… prétentieux, n’ayons pas peur des mots.
Prétentieux, mais cultivés et indispensables.
Oui, indispensables, même si la France, rongée par des années de mauvaise de gestion, gangrenée par une droite sotte et hargneuse, perd peu à peu sa grandeur, il reste que sa parole est écoutée, considérée.
J’en veux pour exemple De Villepin, grandiloquent, vibrant de lyrisme, lors de son fameux discours à l’ONU. La suite de l’histoire nous a tristement appris que ce jour là, il nous a donné le meilleur de lui-même, le reste ne valant pas tripette.

L’Italie et la France s’aiment et se jalousent, c’est ainsi.

L’histoire, qui continue, nous dira qui des deux marquera le futur.

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26.10.2006

Courage les filles !

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Publicité indienne :

« Payez 500 roupies aujourd’hui pour en économiser 50 000 demain»

De quoi s’agit-il ?
D’une banque qui cherche des investisseurs ? D’un organisme d’épargne ?

Non, c’est le slogan du service échographie d’une clinique privée indienne. Pour 500 roupies (10 euros), on peut connaître le sexe d’un fœtus et si, par malheur, il s’avère que c’est une fille, pratiquer un avortement.
Oui, par malheur. Dans beaucoup de foyers indiens la venue au monde d’une petite fille n’est pas souhaitée, pire, elle est indésirable et tout sera mis en œuvre pour empêcher la naissance.
Pourtant, comme nous le signale le terrible documentaire diffusé mardi sur Arte, la loi indienne interdit aux médecins d’indiquer aux futurs parents le sexe du fœtus.
Mais la corruption est telle qu’il est aisé de contourner la loi, 6 millions de fœtus féminins sont éliminés chaque année et tous les acteurs sociaux concernés y trouvent leur compte.
Le pire n’ayant pas de limites, si l’échographie n’est pas pratiquée et que naît une fillette, il arrive fréquemment que, sous la pression familiale, la mère tue l’enfant de ses propres mains, ou la laisse mourir par manque de soins, ou de nourriture.

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Dans le sud de l’Inde, la situation est moins dramatique et nous avons rencontré de nombreux couples, parents heureux et aimants de petites filles. Et je dois dire qu’à chaque fois j’ai éprouvé pour eux une tendresse accrue, justement parce qu’ils n’avaient pas suivi cette horrible coutume.

Coutume ancestrale, mais dont la pratique, au lieu de disparaître, s’est amplifiée durant les dernières décennies, à tel point qu’aujourd’hui, dans certains états indiens, les hommes ne trouvent plus d’épouses et qu’il existe des villages de célibataires ou l’alcoolisme et la violence servent de défouloirs à la frustration sexuelle.
En témoigne le film « Mattrubhoomi, un monde sans femmes», réalisé par un jeune Indien de 26 ans, Manish Jhâ. Dans un village du nord de l’Inde où plus aucune femme ne vit, une jeune fille est vendue à prix d’or, par son père à un homme et à ses cinq fils. La suite est horrible.

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Pourquoi cet acharnement, cruel, stupide, qui prive le pays d’avenir et contraint les hommes à la solitude?

Un dicton indien dit « La femme est sa propre dot », mais ce n’est qu’un dicton, dans la réalité la dot, bien qu’interdite depuis 1960 coûte cher, très cher aux familles et sa pratique est systématique.
Un autre dicton dit « Elever une fille c’est arroser le jardin du voisin » et celui-ci correspond mieux à la réalité. Quand une fille se marie, elle part définitivement, elle change de famille pour se mettre, trop souvent encore, au service de sa nouvelle belle-mère, qui va reproduire, sans pitié, sur elle, les exactions dont elle a été la victime lors de sa jeunesse.
En Inde, le patrimoine des parents revient au fils aîné, qui, en échange, assumera la charge de ses parents vieillissants.
Le système de retraite n’existant que pour les fonctionnaires, les parents qui n’ont pas de fils risquent de finir leur vie dans la solitude et le dénuement.

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Tout cela a toujours existé, alors pourquoi le phénomène s’est-il amplifié ?

L’autre soir sur Arte, Isabelle Altané, démographe, a livré des éléments de réponse, dont celui-ci: « La libéralisation économique tend à s’accompagner d’un accroissement du fossé entre les hommes et les femmes, lorsqu’il y a des progrès, les progrès bénéficient d’abord aux hommes » et elle ajoute que les femmes ici, là bas, et partout, sont les premières victimes du chômage et de la discrimination à l’embauche.

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Le spectaculaire développement économique de l’Inde ne profite pas à tout le monde et, à Bangalore par exemple, les injustices sociales m’avaient particulièrement frappée.

Le mariage, institution fondamentale de la société indienne a donné naissance à un marché, énorme, gigantesque. Pour payer les dots et les frais de la cérémonie, les familles doivent s’endetter pour des années.
Alors de nombreuses familles, toutes classes sociales confondues, choisissent de ne pas avoir de filles.

Et pourtant comme elles sont mignonnes ces petites filles aux cheveux tressés et aux grands yeux noirs. Comme elles sont douces et souriantes ces femmes bafouées, méprisées, contraintes à l’infanticide, parce que, dit un autre dicton « En éliminant une fille le prochain enfant sera un garçon. »

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Et ce libéralisme galopant qu’on nous impose, dans toute son horreur économique, ce libéralisme qui ne parle pas d’être humains mais de ressources humaines, qui ne parle pas de partage mais de profit, ce libéralisme qui tue, qui enchaîne, qui contraint les indiennes, les pakistanaises, les bengalaises, les chinoises, à ne pas mettre au monde, ou à tuer des fillettes, frappe aussi en occident.

Alors nous, femmes occidentales, sommes-nous vraiment à l’abri ?

Après des siècle de soumission nous pensions avoir enfin conquis l’égalité avec les hommes, mais sommes-nous vraiment sûres qu’elle ne soit pas qu’un éphémère feu de broussailles ?

Si les difficultés économiques se multiplient, dans un monde devenu sourd et aveugle, ne serons-nous pas les premières victimes ?

Nous pouvons aider nos sœurs en poussant nos états à faire pression sur les gouvernements des pays concernés.
Nous pouvons œuvrer par le biais d’associations, il en est qui font un travail remarquable.

Les aider, c’est nous aider nous-mêmes, un monde trop déséquilibré n’est viable pour personne.

Courage les filles !

PS : les mecs, on a besoin de vous aussi, sinon, vous pourriez bien connaître les délices de la chasteté!

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22.10.2006

Femmes, mes sœurs

La Repubblica et Il Manifesto relatent aujourd’hui la mort d’une jeune femme. C’était il y a quelques jours, en Irak, dans une ville nommée Al-Quaim, à peu de distance de la frontière syrienne.
Elle a été lapidée.
Devant les habitants de la ville.
Pour adultère.
Par des hommes se réclamant d’Al Quaida.
Elle avait 22  ans.

La victime d’une lapidation est enterrée dans le sol jusqu’à la taille. Puis on lui jette des pierres. A mort.

Après des années d’embargo qui ont ruiné l’économie de leur pays, affamé leurs enfants et vidé leurs hôpitaux de tous les produits médicaux de base, les Irakiens vivent désormais dans la terreur des bombes que l’Amérique de Georges Bush leur envoie généreusement afin qu’ils puissent connaître les délices de la démocratie.
Maintenant, ils doivent aussi se plier aux monstrueux diktats des adeptes d’Al Quaida.

Les mêmes disciples qui ont inondé les campagnes de tracts interdisant aux filles de plus de 14 ans de se rendre à l’école.

Et les femmes, toujours victimes, sont contraintes à porter la burqua.

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Toujours dans la Repubblica, un long article réfléchit sur les déclarations de Jack Straw
qui estime que la burqua portée par certaines musulmanes est un obstacle aux bonnes relations entre communautés et il ajoute, parlant de discussions avec des femmes entièrement voilées : « Je me sentais mal à l'aise de parler en tête à tête avec quelqu'un que je ne pouvais voir. »

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En Inde nous avons rencontré beaucoup de musulmanes, cheveux joliment nattés, bénéficiant de la même liberté de mouvement que les jeunes femmes hindoues ou catholiques.
Nous avons aussi vu des femmes dont le visage était découvert et la chevelure cachée sous un pan du sari.
D’autres en churindar avec l’écharpe sur la tête.
D’autres enfin, entièrement dissimulées sous de noires burquas.

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Je me souviens d’une, rencontrée dans la rue commerçante d’une ville du sud de l’Inde. Nous étions toutes les deux penchées au dessus de l’étal d’un marchand de bracelets. A l’arrière Fabio et son mari comparaient les mérites respectifs de leurs appareils photos.
Nous avons échangé un sourire, enfin, elle a vu le mien et à l’éclat chaleureux qui a traversé ses yeux j’ai deviné le sien.
Nos hommes se parlaient.
Elle m’a demandé d’une vois douce : « Where do you come from ? ».
Je lui ai répondu et nous avons échangé quelques mots. Elle parlait très bien anglais, Indiens émigrés, son mari et elle vivaient en Arabie Saoudite. Elle était professeur, lui ingénieur.
Je nous sentais très proches.
Je lui ai demandé si je pouvais la photographier. Elle a accepté, je crois qu’elle souriait sous le tissu noir, mais je n'en suis pas sûre.
C’est Fabio qui a fait les photos de nous deux.
Très rapidement le mari s’est éloigné. Il n’a rien dit. Il attendait.
J’ai dit à la femme que, si elle avait un e-mail, je pouvais lui envoyer les clichés. Elle a dit « Oh yes ! » et j’ai senti de la joie dans sa voix.
Je lui ai donné ma carte, vite, vite, le visage du mari me semblait moins accort.
Elle a pressé ma main entre les siennes, et a chuchoté « I’ll write to you. »
Puis elle a tourné les talons pour rejoindre l’homme.

Elle ne m’a jamais écrit.
Je pense souvent à elle.

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Dans l’article de la Repubblica, Nadia Fusini, écrivain et professeur d’université anglophone, écrit, de façon très éclairée, que certes il ne s’agit pas de fustiger les femmes voilées, de leur interdire le peu de liberté que leur accorde le port du voile, sans lui, certaines ne peuvent sortir, mais que comme Jack Straw, et comme je l’ai ressenti en parlant avec mon inconnue indienne, il est très difficile de parler avec quelqu’un qu’on ne peut pas voir.

Elle termine son article en s’adressant à toutes ces femmes qui vivent en occident, qui ont accès à la liberté d’étudier, de travailler, de se déplacer à leur gré et qui choisissent d’afficher leur religion en se couvrant sous un voile, faisant par là preuve de ce qu’elle nomme un « narcissisme des petites différences ». Et elle leur demande : vous arrive-t-il parfois de penser à toutes celles, à travers le monde que l’on contraint à se voiler?

Ce à quoi j’ajoute :
Ne voyez-vous pas qu’en revendiquant, comme vous le faites, avec forfanterie, le droit de porter, toujours et partout, le voile qui dissimule, vous encouragez le pire obscurantisme ?

N’êtes-vous pas conscientes qu’en voulant imposer votre choix vous condamnez toutes les opprimées qui ne l’ont pas ?

Etes-vous sûres de ne pas vous tromper, dramatiquement, de camp ?

Pourquoi ne faites-vous pas preuve de solidarité envers celles qui jamais ne pourront jeter le voile aux orties, redresser la tête et dire, tout simplement, non ?

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20.10.2006

La casa delle mamme

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Depuis que nous voyageons régulièrement en Asie, nous éprouvons le désir de nous poser quelque part, de défaire les valises, de nous installer, quelques semaines ou quelques mois.
C’est il y a cinq ans, à Gili Air, petite île indonésienne au large de Lombok que le projet fut le plus près d’aboutir. Nous avions engagé des pourparlers en vue de l’achat d’un terrain, à deux pas de la plage, planté de cocotiers. Nous aurions pu y faire construire une petite maison en bois et palme. Et puis il nous a manqué quelque chose, le petit rien qui fait qu’on passe à l’acte.
Le même désir de propriété s’est manifesté à nouveau au gré de nos voyages, pourquoi pas un petit appartement à Bali, au Laos, ou une cabane en Thaïlande ?
Finalement cette année, épuisés de trimbaler nos valises de train en bus et d’hôtel en hôtel, nous avons décidé de mettre le projet à exécution en achetant ou en louant une maison au Kerala.
C’est à Vellanad, lors de notre séjour à Namaste qu’est né le projet définitif.
Acheter, c’est compliqué, louer c’est simple. Va pour la location.
Mais pourquoi laisser vide dix mois par an une belle maison entourée d’un jardin, alors que tant d’enfants vivent dans des cabanes insalubres ?medium_deepthy-logo.jpg
Namaste gère des maisons familiales, les enfants y sont placés durant toute l’année scolaire, les frais sont payés par des sponsors et ils rejoignent leurs familles pendant les vacances.
C’est bien, ils sont nourris, logés, soignés et fréquentent régulièrement l’école, mais seulement voilà, ils sont séparés de leurs familles.
Pire encore, à mon sens, il peut arriver qu’un seul enfant profite de l’aide de l’association alors que ses frères et sœurs n’en bénéficient pas.
C’est alors que nous avons eu l’idée de nous regrouper avec quelques amis de façon à  héberger - dans cette belle maison que nous commencerons à louer début novembre - des femmes que leurs maris ont abandonnées et leurs enfants.
L’abandon de famille est un sport abondamment pratiqué dans le sud du Kerala (entre autre) par des hommes volages qui vont chercher ailleurs le moyen de ne plus subvenir aux besoins de leurs épouses et de leurs enfants.
Pour les femmes, souvent rejetées par les deux familles, car considérées incapables d’avoir su garder le mâle à la maison, la situation prend rapidement un tour dramatique. Le qu’en dira-t-on étant remarquablement bien organisé (comme partout d’ailleurs), le départ du mari entraîne vite des problèmes de logement et des difficultés pour trouver un travail, même humble.medium_jibin-logo.jpg

Il fut aisé de trouver quatre mères en situation périlleuse. Elles occuperont une partie de la maison avec leurs 7 enfants (5 filles et deux garçons) âgés de 3 à 6 ans. Tous les frais de nourriture, scolarité et santé seront à notre charge et les mamans auront la possibilité de travailler dans la fabrique de cahiers que Namaste est en train de créer.

Nous sommes six couples, chacun s’acquittera de 35 euros par mois.

Mais, ne nous réjouissons pas trop tôt. Les premières difficultés affleurent. Il y a quelques jours, un homme s’est présenté à Namaste, pour, a-t-il dit, « nous éviter des désillusions », il a estimé de son devoir de nous informer que l’une des mamans ne méritait pas de telles attentions car « elle couche avec des hommes ».

Ne nous sentant point investis du rôle de contrôleurs de la moralité de ces dames, il est hors de question d’attacher foi à ce genre de déclarations.
Il n’empêche que ces femmes devront vivre ensemble en harmonie et qu’elles se connaissent à peine.
De plus il n’est pas question de les assister en les infantilisant. Il conviendra probablement d’élaborer en commun un « règlement » intérieur.
medium_jincy-logo.2.jpgNous avons demandé à Sasikala d’assumer le rôle de médiatrice afin d’aplanir les problèmes.

Je pense sincèrement que c’est un beau projet, réalisable, mais qu’il faut se garder de tout idéalisme naïf.
Il y aura des disputes.
Des discussions
Des désillusions.

Mais les enfants mangeront à leur faim, dormiront dans de belles chambres, seront soignés, éduqués, ils auront des jouets et un jardin pour s’ébattre.

Et nous et nos amis aurons une pièce à notre disposition, où s’installer de temps à autre, pour partager le quotidien de la « casa delle mamme », où laisser les valises, les vêtements, les livres, nos affaires, où nous pourrons créer un petit chez nous sous les tropiques.medium_jithin-logo.jpg

Il subsiste néanmoins d’autres interrogations.
Pourquoi choisir d’aller porter secours à l’autre bout du monde, dans un pays qui est actuellement la douzième puissance économique mondiale et qui d’ici vingt ans pourrait bien être la troisième ou la deuxième ?
Quelle part de charité occidentale contient notre démarche ?
La charité n’est pas seulement chrétienne, elle est aussi et tout simplement amour du prochain et les religions, contrairement à ce qu’elles prétendent, n’ont pas d’exclusivité en la matière. Les difficultés insurmontables des femmes indiennes abandonnées nous les avons vues, nous sommes entrés dans les cabanes de palmes insalubres, nous avons entendu la respiration sifflante des enfants asthmatiques, et lu la détresse et la faim dans leurs yeux.
L’Inde sera un jour une grande puissance, mais avant que tous profitent du développement économique, il  faudra du temps, beaucoup de temps.

Et pour finir, qui puis-je donc aider, en France ou en Italie avec 35 euros par mois ?
Une goutte d’eau, une misère.
medium_mekha-logo.jpgJe peux signer des pétitions, écrire des lettres indignées, donner 20 centimes aux mendiants que je croise.

Et voter, juste, si d’aventure un candidat soucieux de soulager la misère française se présente.

Alors, « evviva la casa delle mamme ! »

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17.10.2006

Quelques livres

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A Nice, j’ai aussi passé des heures dans les librairies.

Et j’ai acheté des livres. Pas de premières éditions, trop chères.
Pour le prix de trois nouveautés, on peut avoir huit rééditions dans des collections économiques.
Le choix est vite fait.
Je me suis d’ailleurs demandée qui pouvait bien, pour environ 20 euros, acheter un de ces innombrables ouvrages, sortis à grand battage par les principales maisons d’édition, traitant de Nicolas Sarkozy, et sa famille, de Ségolène Royal, des dessous (même pas chics) de la vie sexuelle de nos présidents, du retour ou non de Lionel Jospin, de Chirac, de Giscard, et de Juppé.
Ça intéresse qui, à ce prix là ?

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Dans notre escarcelle :
- Â« La démocratie des autres » et « Un nouveau modèle économique » d’Amartya Sen, que j’avais envie de lire depuis longtemps, parce qu’il est indien, économiste et qu’il a dit :

« Nous vivons dans un monde indivis où les riches ne peuvent plus ignorer les pauvres ».

« Etre pauvre ne signifie pas que l’on vit sous un seuil de pauvreté fictif, par exemple des revenus inférieurs à deux dollars par jour. Cela veut dire que l’on dispose de revenus qui ne permettent pas de faire face à certaines nécessités, compte tenu des circonstances et des exigences sociales de son milieu ».

Jusqu’alors je me suis peu intéressée à l’économie. Mais aujourd’hui, sous la forme la plus sauvage, elle fait tourner le monde. Il est temps de commencer à essayer de comprendre. Parfois il y a aussi de bonnes nouvelles : le prix Nobel de la Paix décerné à Muhammad Yunus, l’inventeur du micro crédit, c’est de l’économie.

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- Â« La complexité, vertiges et promesses », série d’entretiens avec des scientifiques (entre autres Michel Serres et Edgar Morin), là aussi, ne pouvant tout acheter, j’ai choisi la compil, le best off.

- Â« Eloge de la fuite » d’Henri Laborit dont voici l’avant propos :

« Quand il ne peut plus lutter contre le vent et la mer pour poursuivre sa route, il y a deux allures que peut encore prendre un voilier : la cape (le foc bordé à contre et la barre dessous) le soumet à la dérive du vent et de la mer, et la fuite devant la tempête en épaulant la lame sur l’arrière avec un minimum de toile. La fuite reste souvent, loin des côtes, la seule façon de sauver le bateau et son équipage. Elle permet aussi de découvrir des rivages inconnus qui surgiront à l’horizon des calmes retrouvés. Rivages inconnus qu’ignoreront toujours ceux qui ont la chance apparente de pouvoir suivre la route des cargos et des tankers, la route sans imprévu imposée par les compagnies de transport maritime.
Vous connaissez sans doute un voilier nommé  Désir  ».

Et quelques romans : « Un homme meilleur » d’Anita Nair, un auteur indien dont j’avais beaucoup aimé « Compartiment pour dames » et « L’homme à l’autographe » de Zadie Smith, dont « Sourires de loup », m’avait enchantée.

J’aurais aimé acheter le dernier Onfray, « La puissance d’exister », ou encore « Dans la foule » de Laurent Mauvignier, que j’ai longuement feuilleté, mais il me suffira d’attendre pour les lire et j’ai le temps.

Avoir le temps, le seul vrai luxe.

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16.10.2006

A Nice

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Comme tous, j’ai connu la chance et les désillusions.
Parmi les chances, j’ai celle de posséder quelques mètres carrés dans une rue paisible derrière le port de Nice.
Ce weekend, Nice était magnifique, douce, lumineuse, colorée.
Les travaux pour la construction du tramway encombrent encore une partie des rues et créent une atmosphère particulière. Nice est une vieille dame en plein lifting, le chirurgien est à l’œuvre, il a abattu des arbres, creusé des tranchées, bloqué des rues sur lesquelles les enfants en profitent pour jouer au ballon. D’une certaine manière la ville est plus calme.

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Nous avons flâné dans les rues, passé des heures dans les  librairies, marché sur la promenade des Anglais.

Et j’ai regardé les gens, les autres, tous ces autres que je ne connais pas mais dont je me sens si proche.
Chaque ville se caractérise aussi par ses habitants, ses passants, ses promeneurs. A Nice, le mélange est hétéroclite.

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Les personnes âgées se promènent à petits pas en se tenant par le bras.
Les femmes, disons d’un certain âge, sont maquillées, elles ont du rouge à lèvres, des permanentes bien laquées et des chaussures à talon, leurs hommes portent des pantalons aux plis bien marqués et des chemises repassées de frais. Ils vont danser ensemble l’après-midi dans des locaux qui leur sont réservés, comme le fameux Mississipi.
Ou ils profitent du soleil sur la plage.
D’autres, plus jeunes, patinent sur la promenade main dans la main.
Les touristes baguenaudent.
Les ados, descendus de l’Ariane tournent en bande, loin de leur cité.
Les filles les suivent en riant, pomponnées, maquillées, juchées sur des talons.
Les jeunes mères de famille déambulent entourées d’enfants qui se disputent en marchant.
Les élégantes lèchent les vitrines.

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Nous arpentons la Promenade des Anglais, il fait chaud, la  mer est limpide, le ciel imperceptiblement brumeux.
La journée passe.

Retournée directement en Italie après deux mois d’Inde, j’ai une nostalgie de saveurs françaises, venues de l’enfance, donc, en fin d’après-midi, je fais quelques achats essentiels au Monoprix de la Place Garibaldi.
Essentiels, puisque je vais rapporter à Bologne de précieuses denrées introuvables en Emilie Romagne.
Des petites choses, de petits plaisirs alimentaires, mais qui me manquent : des andouillettes (je ne les achète pas au Monoprix mais dans une charcuterie du vieux Nice), un pot de rillettes, des gésiers confits, des Chamonix à l’orange, des Pailles d’or à la framboise, des petits pots de pâté, du roquefort et un camembert au lait cru.

Dans le Monoprix, un groupe d’adolescents parcourt bruyamment les rayons. Ils font des courses pour l’anniversaire de Marion, dont je crois comprendre qu’elle fête ses 16 ans. L’un s’empare de deux bouteilles de vodka, un autre d’un pack de bières géant, les filles prennent des chips et des biscuits salés. Leurs vêtements sont griffés, les garçons ont un look étudié, mode. Ils se moquent les uns des autres, ou plutôt de l’un d’entre eux, probablement le plus fragile, un visage d’angelot sous des cheveux bruns bouclés. C’est lui qui porte, péniblement l’énorme pack de bières.
Je les reverrais quelques heures plus tard, alors que nous serons attablés chez Pistol, sous les arcades de la Place Garibaldi, devant des moules marinières. Ils passent, les bouteilles de vodka sont vides et l’effet de l’alcool se lit sur leurs visages, dans leur démarche, et dans la tonalité de leurs propos, de plus en plus bruyants. Les filles scandent « Bon an-ni-ver-saire Ma-rion,  bon an-ni-ver-sai-re Ma-rion… ». Et gueule d’angelot traîne à l’arrière, il porte toujours le pack de bière, à moitié vide, mais encore encombrant.

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Revenons au Monoprix ou une très vieille dame, une de ces adorables créatures dont Nice a le secret : cheveux blonds frisottés coiffés d’un petit chapeau, rouge à lèvres, bermuda dernier cri et bottines, me demande si la volaille sur laquelle elle a posé sa main fripée est une poule ou un poulet, car elle aimerait, me dit-elle, la faire bouillir.
J’ajuste mes lunettes, moi non plus je n’ai plus vingt ans, faut pas croire.
« - C’est un poulet, celui-ci aussi, il n’y a que des poulets.
- Ah….et combien ils coûtent ?
- Celui-ci 7,50 euros.
- 7 euros ????!!! C’est cher, s’étonne la dame, 7 euros, pour un poulet… »

Oui, je lui donne raison, c’est cher, surtout qu’il sera périmé demain. Elle se décide finalement pour une barquette contenant deux pattes. Je tente de lui expliquer que ce n’est pas avantageux, le prix au poids étant beaucoup plus élevé. Mais non, elle préfère les deux pattes : « Comme ça y a rien à jeter ! »
Elle me demande ensuite de l’aider à trouver des merguez, pas trop épicées surtout, et avec seulement du mouton.
Introuvables, les merguez du monoprix contiennent plus de bœuf que de mouton.

« Pffffff, soupire la dame, enfin on prend ce qu’on trouve, faut bien se contenter, merci Mademoiselle ! »

Mademoiselle !!!!! Elle est vraiment très très vieille, la dame, tellement vieille que pour elle les âges se confondent.

Mademoiselle, je ne suis pas dupe, mais ça me fait rire.

Sur la mer le ciel devient rose, l’air est doux.

Nice, ce soir, je t’aime.

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12.10.2006

Et vous?

Célestissima sera au repos pour quelques jours.

Je vais me promener .

Mais, suite à un commentaire de Brigetoun: "Et en France qui désigne-t-on quand on demande quels sont les français célèbres ",  je vous pose une question:

Qui sont vos héros?

Merci pour vos réponses.

A bientôt.

10.10.2006

Que reste-t-il de Gandhi ?

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La semaine dernière fut celle de l’anniversaire de la naissance de Gandhi, le 2 octobre 1889.
Pendant nos voyages en Inde je me suis souvent interrogée sur son héritage.
Que reste-t-il aujourd’hui, dans l’Inde qui s’éveille irrésistiblement au monde, du petit homme au rouet ?
Quelles traces ont laissé sa pensée et son action ?

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D’innombrables rues portent son nom, et, paradoxe pour l’ascète qui vivait modestement dans un ashram, se nourrissant de lait de chèvre et de dal (plat à base de lentilles) et se vêtant exclusivement de dhotis qu’il fabriquait lui même avec du coton indien, ce sont les plus grandes, les plus commerçantes, les plus riches, celles où le modernisme s’affiche sous sa forme la plus échevelée.
La MG (Mahatma Gandhi) road de Bangalore.
La MG road de Chennai.
Toutes, ou presque, les rues principales des villes les plus importantes, portent le nom de celui qui préconisait de « vivre simplement pour que tous puissent simplement vivre ».
Ses statues dominent les places et les carrefours. Il est debout, il marche, sa besace sur l’épaule, son bâton de pèlerin dans la main et les orteils légèrement soulevés, en plein mouvement.
A Pondichéry les enfants grimpent sur ses pieds et se laissent ensuite glisser, comme sur un toboggan.
A Kanyakumari les gardiens du mémorial qui lui est dédié et où ses cendres furent recueillies avant d’être répandues dans la mer, harcèlent les touristes étrangers pour obtenir quelques pièces d’euros qu’ils échangeront, avec d’autres touristes, contre des roupies.

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J’ai questionné. Dans le cadre de notre documentaire, j’ai demandé à tous nos interlocuteurs qui était leur héros, un seul, Anil, m’a répondu Gandhi. Les autres ont cité des acteurs, le président de l’Inde, des hommes politiques représentant leurs opinions ou un membre de la famille particulièrement marquant.
Je dois dire que j’ai été surprise, un peu déçue aussi. Moi, occidentale, à la même question j’aurais répondu « Gandhi, le pacifiste, qui a réussi à ‘ battre sans violence l’ennemi à son propre jeu » pour bouter les anglais hors de son pays ‘ ».
Eux non.
Plus surprenant encore, au Mohamed Jamal College de Trichy, où avec la complicité de notre ami Mohammed, je fais une leçon de français aux étudiants de deuxième année, je demande « Qui sont vos héros ? »
Acteurs et musiciens indiens.
J’insiste « Et Gandhi ? »
Regards interrogateurs.
L’un deux risque « Sonia ? »
« Non, répond Mohammed, le Mahatma ! »
Soupir dans la classe, le Mahatma, bon sang, mais c’est bien sûr ! On l’avait oublié !
Oublié ? Il est partout.

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Alors j’ai continué à réfléchir, j’ai cherché des indices, j’ai lu et j’ai trouvé des éléments de réponse.
Par exemple : « La grande force de notre démocratie –mais aussi sa grande faiblesse- réside dans le peuple. Les indiens peuvent se montrer paresseux, corrompus, vulgaires ou égoïstes. Mais, pour peu que quelque chose les indigne ou que l’on contrarie leur fibre idéaliste, ils se soulèvent comme un seul homme pour donner toute la mesure de leur grandeur collective »
Tarun J. Tejpal , rédacteur en chef de Tehelka.

En Inde, depuis des siècles et des siècles des communautés religieuses différentes se côtoient, œuvrent ensemble.
Actuellement le Président de l’Union, Abdul Kalam est musulman, le premier ministre Manmohan Singh est sikh et Sonia Gandhi, la présidente du parti du congrès, majoritaire, est hindoue d’origine catholique.
Et ça marche. Avec des tensions, des émeutes, des révoltes, des complots, mais, quand même, l’Inde compte 1,2 milliard de personnes.
1,2 milliard de personnes qui toutes sont fières d’être indiennes.

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La démocratie en Inde, c’est une vieille histoire. Pour s’en convaincre il suffit de regarder le panthéon des divinités. Tout y est représenté, les éléments naturels comme l’être humain sous toutes ses facettes, le destructeur et le créateur, le grossier, le coléreux, le séducteur, la femme aux cinq maris, l’ascète et le glouton.

La pluralité est la clé de l’Inde et Gandhi, tout au long de sa vie a considéré, a aimé, les différentes communautés, il leur parlé, les entraîanat dans son sillage. Ceux qui, par milliers, l’ont suivi pendant la longue marche du sel n’étaient pas seulement hindous, mais aussi musulmans, chrétiens, sikhs, parsis.

Et j’ai réalisé que ma question n’avait pas de sens. Il est stupide de chercher les traces de Gandhi. Tous les indiens sont Gandhi et lui ne pouvait naître et agir que sur cette terre, parce qu’indien, justement.

« Les prochaines générations auront du mal à croire qu’un tel homme ait pu exister », a déclaré Albert Einstein.

Et j’ajoute : « les prochaines générations occidentales auront du mal à croire qu’un tel homme ait pu exister ».

Pour les indiens, no problem, il fait partie d’eux.

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07.10.2006

Hindouisme

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Il y a quelques temps, j’avais écrit ce cours texte sur l’hindouisme, je vous le propose aujourd’hui car il me semble s’inscrire dans la tonalité du fil des commentaires :

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D’après la cosmologie hindouiste, l’univers n’a pas de substance. La matière, la vie, la pensée ne sont que relations énergétiques, rythme, mouvement et attraction réciproque. Shiva, le dieu destructeur est considéré comme une force positive, car, après la destruction, survient la création régénératrice. Il est symbolisé par le lingam qui représente l’énergie sexuelle.

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Le lingam haut représente le phallus, il est parfois fiché dans le yoni, représentation du sexe féminin, le petit lingam représente le clitoris (cette interprétation est contestée par des grincheux que la jouissance féminine terrorise)

Plusieurs milliers d’années avant JC (entre 5000 et 1500) les indiens avaient compris l’importance vitale de l’énergie sexuelle. Non seulement parce qu’elle donne la vie, mais aussi car elle donne naissance au mouvement et à la création.

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Aujourd’hui encore, les Indiens adorent ces symboles. Même si leur sens réel a été dilué par des siècles de domination musulmane et anglaise.

Le sexe est partout, dans le ventre humide, luisant et parfumé des temples, sur leurs façades sculptées, dans les danses lascives et rythmées des femmes.


«Je comprenais pourquoi les anciens vénéraient et redoutaient l'extase sexuelle. Elle permet à chaque individu d'atteindre son propre dieu. La clé de l'univers ne repose pas entre les mains du prêtre ni du roi. La clé de l'univers repose dans le corps de l'amant ou de l'amante.»
Tarun Tejpal

Je crois, sincèrement, que notre monde occidental est au bord de l’abîme.
Mais l’Inde, millénaire, survivra.

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05.10.2006

Encore en bus, Céleste !

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L’autobus urbain indien est de prime abord peu engageant. Souvent dans un état de délabrement avancé, bondé, des grappes d’hommes agrippés les uns aux autres bloquant les marche- pieds, il affiche sa direction en langue locale ou par un chiffre dont on connaît rarement le code.
Mais, lassés du style de conduite des pilotes d’auto rickshaw et fatigués d’user nos semelles sur les bas côtés (la notion de trottoir est très floue dans l’Inde du sud), en zigzagant entre les trous, les piétons, les vaches et divers véhicules, nous avons appris à l’utiliser.
Et finalement c’est bien !

medium_autobus1.jpgLa particularité la plus frappante, pour nous occidentaux habitués à la mixité, est la séparation des sexes qui s’effectue naturellement et que tout le monde respecte.
Le bus est peu rempli, nous y montons tous les deux par la même porte et nous installons côte à côte sur une banquette.
Aucun problème, mais bientôt arrive l’affluence, Fabio doit laisser sa place à femme, car il est hors de question que celle-ci s’asseye à côté d’un homme qui ne fait pas partie de sa proche famille, et rejoint le fond du bus où sont massés les hommes.
Zut, je ne le vois plus ! Je scrute d’un Å“il inquiet  les profondeurs du bus et des mains se lèvent pour me faire signe « Il est là, au fond, t’en fais pas, on surveille ! »
Et me voici au milieu des femmes, parfumées, colorées, m’épiant du coin de l’œil ou cherchant le contact, parfois même me touchant du bout des doigts, le plus souvent riant malicieusement entre elles en me regardant.
Et moi, la féministe, la partisane de la mixité, je me dis « Qu’est-ce que c’est bien d’être séparée des hommes, de ne pas risquer les attouchements, les plaisanteries grasses, les regards appuyés et les relents sudoripares ! »
Et y pensant plus avant je me dis que les rapports entre les hommes et les femmes indiens sont bien différents de ceux que nous connaissons en occident.
J’ai la sensation que les femmes ne sont pas, comme en Europe, regardées comme des objets sexuels plus ou moins appétissants, et ce, quelque soit le niveau culturel au social.
A côté de notre hôtel de Pondy, il y avait un immeuble en construction, où travaillaient ensemble des maçons et des porteuses charriant le sable sur leurs têtes. Alors qu’elles y sont inexistantes dans les pays occidentaux, les femmes sont nombreuses sur les chantiers indiens (et en Asie en général) et, projetant sur elles mes propres angoisses, j’avais toujours ressenti une de pitié toute chrétienne (on ne contrôle malheureusement pas tous ses sentiments,  il en est de tenaces, ancrés dans l’inconscient comme des patelles sur un  rocher) en les voyant.
A Pondy, embusquée sur mon balcon, je les observe. Première surprise, ces femmes qui arrivent tôt le matin pour commencer la journée de travail, ne sont pas en haillons, mais en sari, proprettes et soignées certaines ont du jasmin dans les cheveux. Les vieux vêtements elles les mettent seulement pour travailler. medium_CIMG0320.JPG
Elles couvrent leurs têtes de foulards sur lesquels elles ajustent des petits coussins ronds sur lesquels elles poseront les seaux de sable.
Je les entends rire et plaisanter entre elles et avec les hommes.
Le travail est pénible mais effectué dans la bonne humeur et le respect. A aucun moment je ne dépiste une attitude ambiguë ou déplacée.
Le soir venu elles disparaissent derrière le bâtiment pour remettre les saris et les fleurs dans les cheveux, puis s’en vont, poursuivant joyeusement leurs discussions.
Ces femmes sont des intouchables, elles sont payées, peu, à la journée, elles sont pauvres, mais emplies d’une dignité qui force l’admiration et qui empêche probablement les hommes de laisser libre cours à des pulsions qui n’ont rien à faire sur un chantier.

Pourtant la société indienne ne donne pas la part belle aux femmes, loin de là, les violences contre elles y sont nombreuses et leur liberté d’action souvent limitée.
Alors est-ce son extrême division par castes qui bloque la libido masculine dans la sphère publique ?
Ou les rapports amoureux, au fond des alcôves, sont-ils suffisamment riches et épanouissants pour éliminer le désir brut et brutal né de la frustration ?
Je pencherais assez pour cette hypothèse, ne sommes nous pas au pays du Kamasoutra, comme en témoignent les façades des temples dravidiens ou les innombrables fresques dédiées aux amours orgiaques de Krishna ?

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En savoir plus, enquêter, lors du prochain voyage.

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