Féministe ?

Qui peut encore nier que le sexisme empoisonne la vie des femmes ?
Ici, là et ailleurs.
Partout dans le monde.
Femmes discriminées, humiliées, niées, dépossédées de leurs droits, contraintes, battues, violées, blessées, défigurées, assassinées.
Et cela dure encore et encore.
Croit-on avoir à jamais avoir acquis un droit, celui de disposer de son corps, celui de choisir de donner ou non la vie, celui d’avorter, qu’il est remis en cause, comme en Espagne.
En France, une fange conservatrice n’en finit pas d’éructer, contre l’avortement, contre son remboursement, pour la vie, disent-ils, ces hargneux combattants qui veulent contrôler nos corps.
Et le féminisme en rempart ?
Le féminisme ? Parlons plutôt de mouvements féministes. Des mouvements qui se déchirent et qui souvent ne trouvent pas d’alliance alors que la maison liberté risque de brûler.

En ce qui me concerne, c’est très clair :
J’estime que l’IVG est un droit, qu’il doit être pratiqué lorsqu’une femme le souhaite et que sa détermination doit suffire. Il doit aussi être effectué dans de bonnes conditions et être remboursé, comme tout acte médical.
Je pense (j’espère) que sur ce point tous les courants féministes sont d’accord.

Les divergences sont autres et tellement fortes que même au cœur d’une bataille primordiale, la sauvegarde de l’IVG, le rassemblement semble difficile.

J’ai un credo « mon corps m’appartient », d’où ma position sur ce qui clive, profondément.

Puisque « mon corps m’appartient », je peux m’habiller à ma guise et porter un voile si ça me chante. Et qu’on ne vienne pas me chercher querelle avec la laïcité. Comme si le foulard était un vecteur fondamental du prosélytisme religieux ! Comme si on ne savait pas que celui-ci passe principalement par la parole !
La laïcité est essentielle, elle assure à chacune, à chacun, de pouvoir vivre sa foi ou sa non foi.
Pour certaines féministes, elle n’est qu’un prétexte. La vue d’une femme voilée choque ces âmes sensibles, elles y voient un symbole de soumission.
Compassion ou total mépris des convictions, de la personnalité de « l’autre », celle qui porte le voile et qui ne peut être que soumise, influencée, incapable de choisir elle-même ?
Compassion ou racisme déguisé qui considère que la femme blanche occidentale est une créature supérieure qui sait mieux que toutes les femmes du monde ce qui est mieux pour elles ?
Comme un relent de colonialisme…
Mépris.

Puisque « mon corps m’appartient », je peux baiser avec qui je veux, quand je veux et suivant les conditions que j’ai établies.
Que j’ai établies.
L’esclavage sexuel est une abomination et j’enrage de voir que le temps passe, que les promesses s’empilent mais qu’il existe toujours. Il est une des formes de l’esclavage moderne, cette horreur qui maintient dans la misère et prive de tous droits des millions de personnes à travers le monde.
La prostitution contrainte doit être éradiquée, ses réseaux pulvérisés, ses organisateurs sévèrement condamnés.

Peut-on considérer qu’une personne (femme ou homme) qui se prostitue pour survivre le choisit librement ? Non bien sûr ! Mais alors la lutte contre les causes, la pauvreté, la précarité, l’exclusion sociale, doit être implacable. Que l’on aide, que l’on protège les personnes les plus faibles économiquement, qu’on ne les condamne pas hypocritement à la rue pour ensuite leur interdire un moyen de subsistance.
Que l’on combatte la marchandisation des corps, considérés uniquement comme force de travail, ressource humaine corvéable à merci, chair à entreprises, qu’on en finisse avec la loi du marché et les délires du libéralisme.
Mépris de l’autre !

La prostitution choisie existe-t-elle ? Pourquoi pas ?
J’ai consciencieusement lu des dizaines d’articles où d’éminentes (ou non) représentantes de mouvements féministes expliquent qu’en matière de prostitution le libre choix n’existe pas, qu’il est impossible et que mêmes les putes qui s’en revendiquent se trompent, qu’elles ne savent pas.
Encore du mépris ! Aucun ces écrits ne m’a convaincue.

Je me suis posée une question : et moi est-ce que j’aurais pu me prostituer ?
Je n’en sais rien. Je ne me suis jamais trouvée dans une situation ou cela aurait pu, ou non, se produire.
Par contre, dans une autre vie, j’ai parfois baisé sans en avoir la moindre envie, pour faire plaisir à l’autre, pour maintenir un équilibre dans un couple dont longtemps j’ai refusé de voir la déliquescence, par lâcheté, par peur.
Ce faisant, j’ai conscience d’avoir été à la fois victime et complice du patriarcat. Parce que femme je devais me soumettre au désir de l’autre, l’homme, ses « besoins » sexuels, son machisme.
J’ai aussi beaucoup trop permis, sans réagir, que l’on m’assigne des tâches ménagères soit disant « féminines ». J’ai peu d’inclination pour tout ce qui concerne la maison, l’intérieur, sa décoration et son entretien et si j’aime bien cuisiner de temps à autres la confection quotidienne des repas me barbe.
Banal, malheureusement !
Le patriarcat impose un tel conditionnement qu’il est extrêmement difficile de s’en défaire. Tous les individus sont insidieusement formatés, tenus de se comporter en fonction des règles patriarcales et les femmes en sont les victimes.
Le patriarcat, suppôt de toutes les dictatures, s’affiche partout et sans cesse y compris dans la presse féminine qui n’en finit pas de vanter la femme objet, sa gentillesse, son sens du dévouement, son appétence pour le consumérisme, sa futilité, sa fragilité.
Mépris encore !

Alors, féministe ou pas ?
Une question simple et une réponse compliquée : féministe oui, dans mes convictions mais je n’ai pas pour autant envie de rallier une bannière, de faire allégeance et de croiser le fer dans des discussions épuisantes et stériles. Pas envie non plus de me justifier pour une parole étourdiment lâchée, pour une remarque incomprise, pour une opinion différente. C’est aussi fatigant qu’inutile et l’agressivité inter féministes me rebute.
Je le regrette mais qu’importe, je poursuivrai mon chemin, jusqu’au bout.

Pour illustrer ce billet, une femme, parmi tant d’autres, si pauvre que, chacun matin, elle ramasse du sable pour le vendre aux marchandes de poisson. Une Indienne, parce qu’en Inde le patriarcat  est, pour beaucoup trop  de femmes, insupportable.

femme indienne

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