Huile de coco

Chaque jour, les femmes indiennes enduisent leurs chevelures d’huile de coco. Son application régulière, accompagnée d’un massage du cuir chevelu, épaissit et protège les cheveux. C’est une tradition millénaire.
Quand je pense à mes amies indiennes, cette odeur de coco, si caractéristique  me chatouille presque les narines.

Hier, à Vellenad, au sud du Kerala, état grand producteur de noix de coco, nous sommes allés à la fabrique d’huile du village. C’est une entreprise gouvernementale. Au Kerala, communiste depuis 1957 et aujourd’hui gouverné par une coalition de gauche (parti du congrès, parti communiste) les citoyens sont très impliqués dans la vie politique. Dans chaque ville ou village il y a des magasins et des entreprises appartenant à l’état.

En cette époque où des esprits pervers assimilent systématiquement le marxisme au fascisme, l’exemple du Kerala illustre parfaitement la différence entre une idéologie humaniste, certes souvent et malheureusement dévoyée et une doctrine mortifère. Pas de goulag au Kerala mais un taux de scolarisation frôlant les cent pour cent et d’innombrables initiatives sociales, dont la fabrique d’huile de coco de Vellanad.
Le marxisme peut être revisité, repensé, servir de base de réflexion pour construire un nouveau type de société mais tout ce qui relève du fascisme, de la dictature doit être combattu, sans relâche.

A Vellanad la fabrique est aussi un magasin. Les producteurs  petits ou grands,  y vendent leurs noix de coco. Celles-ci sont directement achetées ou transformées en huile qui est ensuite commercialisée sur place, chacun arrivant avec sa bouteille ou son jerrycan. Elle sera utilisée pour les cheveux et bien sûr pour cuisiner.

Les noix  de coco sont d’abord coupées en deux d’un vigoureux coup de machette, puis une femme, d’un geste sûr et rapide, sépare la coque de la chair à l’aide d’un couteau.
Dans les campagnes, la chair, débitée en morceaux, sèche au soleil, étalée au bord des routes mais à la fabrique il y a une dryer machine (séchoir). C’est un énorme four, alimenté par les coques et qui déssèche lentement la chair, jusqu’à la disparition quasi totale de l’humidité (la teneur en eau ne doit pas dépasser 6%).
La chair de coco séchée, appelée coprah est ensuite broyée dans une autre machine. Vient enfin le pressage. Cette fois c’est un homme qui officie car il faut un bras robuste pour tourner la manivelle.
L’huile qui s’écoule est filtrée avant d’être vendue et les résidus servent à nourrir les animaux.

Dans le processus artisanal de fabrication de l’huile de coco, rien n’est perdu.

Je suis de plus en plus convaincue que nous aussi devons impérativement revenir à ce type d’entreprises locales, moulins, pressoirs et autres. La technologie aidant, le travail des hommes et des femmes pourrait être nettement moins pénible qu’auparavant, les communautés villageoises posséderaient plus de biens communs et l’agriculture serait revitalisée.

Mais pour cela il faut se débarrasser du libéralisme, du libre échange, de la course au profit,  des Monsanto, de tous les fabricants de misère.

Il y a deux types de biens communs. Les ressources vitales – eau, terre, semences, air, océans – données par la nature et modifiées par les humains. Et les services liés aux besoins essentiels : l’éducation, la santé, la façon de gérer nos villes, comme les services de lutte contre les incendies… Ce sont des services publics vitaux. Ce qui compte, c’est « l’esprit de service » : quand un pompier lutte contre le feu, quand il aide les gens, il ne regarde pas le danger. Et quand ces services sont privatisés, les coûts augmentent. Un tiers des emprunts en Inde sont liés à l’achat de médicaments. La principale raison pour laquelle les gens vendent leurs maisons aujourd’hui, c’est pour se soigner. La privatisation des services publics prive la société de ses droits. Nous devons les défendre comme des biens communs.
La civilisation que nous devons construire est une civilisation de larges réseaux de communautés souveraines, organisées de manière autonome, et non dominées par un pouvoir centralisé, politique ou économique. “
Vandana Shiva
En prime, une passionnante  interview de cette grande dame, écologiste, écrivaine, physicienne, prix Nobel alternatif, résistante.

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