Bangkok, brèves rencontres

Debout devant la porte du Moghul Room, délicieux restaurant indien situé dans un soy du quartier Sukhumvit de Bangkok , elle incite les clients à en franchir la porte.
« Verrrry good indian food, verrrry good indian food… ».
Un sourire est plaqué sur ses lèvres mais sa voix manque de conviction. Indienne, donc pudique, elle a soigneusement boutonné le long chemisier qui recouvre le haut de son jean. Le contraste avec les Thaïlandaises qui, dans le bar en face, sont attablées avec des occidentaux est saisissant.

Nous avons choisi de dîner sur la terrasse, juste à côté d’elle et souvent nos regards se croisent. Nous nous sourions. Elle aperçoit soudain le petit diamant qui orne ma narine.
« Oh, nice ! India ! »
Je lui confirme que j’ai bel et bien acheté ce bijou en Inde. J’aimerais aussi lui expliquer que j’y suis très attachée, que- ça peut paraître nunuche je sais- porter ce bijou c’est comme avoir en permanence un petit fragment d’Inde sur moi, en moi. Mais d’une part le lieu ne se prête guère à ce genre de déclaration, d’autre part l’anglais de mon Indienne de Bangkok est plutôt approximatif et pour finir, tout en elle, de ses vêtements à son attitude réservée,  indique que porter l’Inde en soi, elle connaît !

Cahin-caha, la discussion se poursuit. Je lui énumère les villes et lieux indiens où nous sommes allés, elle m’explique qu’elle est née au Manipur, un état situé juste à côté de la Birmanie. Et puis il y a 8 ans elle s’est mariée –  je ne lui pose évidemment pas la question mais sachant qu’en Inde le mariage arrangé est  la norme, le sien n’a sûrement pas échappé à la règle- et son époux l’a amenée à Bangkok pour travailler dans ce restaurant.

« My husband… » chuchote-t-elle en me désignant d’un coup de menton un trentenaire basané qui brasse de l’air dans la salle avec un air important.
Et non, dit-elle dans un soupir que je devine déçu, elle n’a pas d’enfants, trop de travail pour faire des bébés.
Oui, elle aime bien Bangkok, enfin, elle préfèrerait vivre en Inde mais on n’a pas toujours le choix, elle tout au moins, elle ne l’a pas.

Nous parlons cinéma. Hier elle a vu « My name is Khan » le dernier film de Shah Rukh Khan. Elle beaucoup aimé.
Nous avons fini de dîner. Oui, c’était very good, really, just like in India.
Nous nous saluons.
Namaste !

Comme au Japon, les passagers qui attendent un sky train sont très disciplinés. Des flèches gravées dans le sol indiquent où les voyageurs descendent et des files se forment sagement de chaque côté.

Un occidental qui vit à Bangkok ( ils sont nombreux), ou qui y réside fréquemment se range automatiquement dans une queue et patiente paisiblement. Le touriste, lui, ignorant ces pratiques inconnues – j’ajoute perfidement absence de sens de l’observation, désintérêt, voire même mépris dans certains cas- ne se met pas dans une file et attend n’importe où.
C’est le cas quand le train s’immobilise à Siam. Deux couples de touristes, appareils photos, et sacs en plastique  emplis de chaussures de marque (beaucoup moins chères à Bangkok qu’en occident), encombrent l’espace dévolu aux passagers sortants. Surpris par le déferlement, ils se déportent sur le côté sans accorder la moindre attention à celles et ceux qui, tranquillement alignés, attendent leur tour pour pénétrer dans le wagon où les places assises, peu nombreuses, sont très convoitées.
Et pan, juste devant moi, une jeune femme décoche un coup de coude à l’homme qui vient de la bousculer. Mon regard croise celui de son amie et nous éclatons de rire. Quelques minutes plus tard, entassées les unes contre les autres dans le wagon, nous en rions encore.
« Il faut bien défendre nos droits ! » me dit la « cogneuse » dans un anglais impeccable.
J’acquiesce avant de leur expliquer qu’il ne faut pas en vouloir aux occidentaux.
« Chez nous, en France, ou en Italie, par exemple, quand le métro s’arrête, tout le monde se précipite à l’intérieur dans le désordre, c’est comme ça. Alors quand ils sont ici, les touristes qui ne sont habitués à se mettre en file ne font pas attention, ils font comme dans leurs pays. »
Ce que je raconte les surprend. Elles pensaient les Européens beaucoup plus respectueux des autres.

La conversation continuant elles m’apprennent qu’elles sont « teachers », comme nous.
Elles enseignent l’anglais dans une école privée où il y aussi des cours de français !
D’ailleurs, m’assurent-elles juste avant de quitter le train, ici, les professeurs étrangers sont très recherchés.
Profs de français et d’italien à Bangkok pendant un an…why not ?

L’idée est séduisante, nous allons peut-être y réfléchir.

Sky Train à Bangkok (la vidéo):

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