Small Things Productions

2007

Quand les mots anciens ne se forment plus sur la langue, des mélodies nouvelles surgissent du cœur; et là où les vieilles pistes ont disparu, un nouveau pays se révèle avec ses merveilles.

Rabindranath Tagore, "Gitanjali"

LES TEXTES:

(CHENNAI ET TAMIL NADU)

Chennai, enfin

Kollywood Party
Chennai, d’un set à l’autre
Johny, un garçon positif
Johny : de la difficulté à être musulman
journée à Madurai : chez Mohammed (1)
journée à Madurai : chez Mohammed (2)
Une soirée à Madurai

(PONDICHERRY et MAHE)

14 juillet à Pondicherry
Pondicherry, les gens
Les gens de Pondy : Jean-Michel
Les gens de Pondy (suite)
D'autres gens de Pondy
Ah les filles, ah les filles
La nouvelle Pondy
Mahe, une perle au bord de la rivière noire
Mahésiennes et Mahésiens
Mahe, d’un lieu de culte à l’autre
Quitter Mahe

(KERALA)

Kaippattoor au quotidien
Chez Roy à Keerithodu
Un dimanche à Ernakulam
Souffrir dit-elle
Mon dentiste préféré
La casa delle mamme : la rencontre
La casa delle mamme : Happyland
Namaste : l’école des handicapés
La casa delle mamme : deux noix de coco fraîches…
Casa delle mamme (suite) : les Sims
Namaste : Dix petits indiens
Namaste : au cirque

(ON THE ROAD)

De Chennai à Kaippattoor
De Kaippattoor à Pondicherry
Inde, 60 ans d’indépendance
Je craque ?
Rentrer

 

LES PHOTOS:

Ranganathaswami Temple in Trichy
Mahe: la rivière et les fleurs
Mahe: people and culture
Chennai d'un set à l'autre
Pondicherry: Peter, Flora et les autres
Pondicherry: marché aux poissons
Pondicherry: le marché
Railways: de Angamali à Trivandrum
Happyland avec "la casa delle mamme"

LES VIDEOS:

Mahe, une perle indienne
Jogging in Pondicherry
Fisherman in Pondicherry
Une nuit à Pondicherry
Défilé in Pondicherry
Happyland et la casa delle mamme

Cerca / Recherche / Search

CERTAINS DROITS RESERVES:
Creative Commons License

" Kaippattoor au quotidien "

Les occidentaux imaginent souvent les Indiens comme un peuple d’hindouistes adorateurs de Shiva et de Ganesh, scindé par un immuable système de caste, ce qui est exact pour environ 80% de la population. Les autres sont musulmans (12%), sikhs (18 millions), parsis, bouddhistes, jaïnistes et chrétiens.
Une chose est sûre, la religion, quelle qu’elle soit, et frisant généralement la bigoterie, tient un rôle essentiel dans la vie des Indiens.

Les catholiques, quant à eux, sont environ 18 millions et ils sont principalement installés à Goa, ancienne enclave portugaise et surtout au Kerala.
Même si les historiens estiment que le christianisme fut introduit en Inde vers le IVème siècle par l’intermédiaire d’un marchand syrien, venu, avec 400 familles, chercher fortune sur la terre kéralaise, l’église locale attribue ce mérite à Saint Thomas qui aurait débarqué vers l’an 50 à quelques kilomètres de Kaippattoor, portant dans sa besace sa croix et son chapelet.
C’est pourquoi, Saint Thomas jouit d’une considération particulière de la part des fidèles et qu’il est, chaque année dûment fêté, le 3 Juillet, nous y voilà !
Etant totalement immergés dans la communauté catholique de Kaippattoor, nous avons donc été invités à participer à une fête en l’honneur du saint fondateur.
La paroisse est divisée en « unit », regroupant une cinquantaine de familles, et les festivités ont lieu tour à tour chez les uns et les autres. La cérémonie d’hier soir s’est tenue chez l’oncle de Sini.

Tout l’après-midi les femmes ont préparé un énorme gâteau de riz au lait de coco agrémenté de fruits secs. Il leur a fallu tourner longtemps et vigoureusement la pâte avant de l’étaler pour la laisser refroidir. La grande Lilama, qui veut toujours faire mieux que tout le monde, a tourné très longtemps, m’a raconté Sini, alors la tante (que nous appelons la zia spia car elle veut toujours tout savoir) a persiflé « Tant mieux, c’est elle qui fait tout ! »
Et puis ces dames ont fait le tour des ragots du moment, le plus scandaleux étant la supposée fugue d’une jeune fille, d’un autre « unit », avec un jeune musulman qui étudie dans la même université qu’elle.
Car, au sein de cette communauté catholique, toute adorable chaleureuse et solidaire soit-elle, on retrouve bien sûr toutes les caractéristiques (jalousie, moquerie, critiques, rivalités…) que n’importe quel groupe d’humains a bien du mal à éviter et ses membres ne manifestent pas la moindre ouverture d’esprit lorsque d’aventure une union mixte se profile à l’horizon et particulièrement si c’est une jeune fille qui est concernée.
Le père retrousse alors ses manches et n’hésite pas à filer une bonne raclée à la coupable - notons au passage, pour les ex jeunes filles de ma génération, et des précédentes, que les pères français utilisaient aux aussi, et sans vergogne, cette subtile méthode de dissuasion qui produisait souvent un effet contraire à celui recherché, dans ce cas, comme dans celui du pater familias keralais le prétexte étant : « ton avenir, tes études et je sais mieux que toi ce qui te convient ».
Bref au Kerala, ça marche encore, dans la plupart des cas les amoureux renoncent et acceptent ensuite, sans broncher, un mariage arrangé.
Mais ceux qui s’entêtent dans leur amour n’ont d’autre choix que la fuite.

Lorsque nous sommes arrivés, le curé, grandiloquent, a chanté nos louanges et la petite assemblée nous a chaleureusement applaudis. Ce qui bien sûr était totalement exagéré et nous a mis dans l’embarras.
Puis il a expliqué que, grâce à nous, Anil et Monu ont pu rejoindre la pieuse Italie et tous nous ont regardés en souriant, ce qui a accentué notre malaise. Ce qui, par contre, est rigolo est que pendant que nous faisons les malins chez eux, anil et Monu, sont chez nous occupés à observer les curieuses coutumes de Cléo (ma fille) et de ses amis.

Finalement on a fait mine de nous oublier, le curé a béni la galette et les fidèles ont chanté à gorge déployée, puis, armé d’un grand couteau, le représentant de Dieu a découpé la fameuse galette et en a distribué quelques parts.
Ensuite on a à nouveau chanté, puis le curé s’en est allé vers une autre célébration, dans un autre « unit », et on a récité quelques prières – du moins j’imagine que c’était des prières, je n’ai aucune expérience de la chose et tout cela se déroulait en malayalam, langue parfaitement incompréhensible – enfin nous avons mangé des gâteaux, échangé des sourires, et filmé la scène.

     
Small Things Productions

2007

Claudine Tissier & Fabio Campo