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Mohammed et le Président de l’Inde

Notre ami Mohammed a été reçu par Abdul Kalam, le président de l’Inde.
Vous, mes fidèles lectrices et lecteurs qui avez suivi au jour le jour ma chronique indienne, vous souvenez vous de Mohammed ?

Donc Mohammed a traduit en français l’autobiographie d’Abdul Kalam « Wings of fire » et celui-ci l’a convié à un entretien.

Fils de pêcheurs du Tamil Nadu, Abdul Kalam, âgé de 74 ans, est un scientifique de très très haut niveau. Il a passé sa vie dans les laboratoires indiens de recherches militaires et spatiales et est considéré comme le père des programmes de missiles de son pays.
Voilà qui ne le rend pas particulièrement sympathique, mais il n’est en rien belliqueux, estimant que la dissuasion nucléaire et une forte puissance militaire sont les garants de la paix.
Opinion qu’il m’est difficile de partager, mais respectable, d’autant que d’autres aspects de se personnalité me semblent fort intéressants.
Tout d’abord il a réussi le tour de force d’être élu président avec à la fois le soutien du BJP, le parti nationaliste et fondamentaliste hindou dont les leaders les plus extrêmes sont d’une remarquable intolérance et celui du Parti du Congrès (parti de Nehru) auquel appartient l’actuel premier ministre sikh Manmohan Singh.
Ensuite, né musulman, Abdul Kalam fait preuve d’une grande ouverture d’esprit en ce qui concerne les autres religions, il lit quotidiennement la Bhagavad Gita et est végétarien.

C’est donc un homme qui rassemble, dans un pays de 1,2 milliards d’habitants, pratiquant des religions différentes et utilisant 22 langues officielles, on ne peut pas dire que ce soit un détail.

Mettant en avant la primauté de la nation sur l'individu, il a appelé l'Inde à se comporter comme un grand pays, conscient de sa force, tant économique que militaire, mais également autosuffisant : les citoyens indiens « doivent être Indiens et acheter indien » ce qui est une référence au concept traditionnel de la Swadeshi.

La quoi ?
La Swadeshi : autre économie décrite par le Mahatma Gandhi, qui n’est ni un système comme le capitalisme ou le socialisme, mais un état d’esprit, une force intérieure qui nous incite à contrôler nos désirs et à les restreindre à ce qui est accessible dans notre environnement immédiat. En gros, comme ont vécu nos ancêtres pendant des millions d’années, et on peut penser que, tout bien considéré, ils n’étaient pas nécessairement plus malheureux que beaucoup d’êtres humains aujourd’hui. L’adepte du Swadeshi achète donc en priorité à ceux qui vivent dans sa propre communauté, même si le produit local est de moins bonne qualité ou plus cher.

Quand je vois l’invraisemblable quantité de camions qui sillonnent les autoroutes européennes pour transporter, par exemple, des sacs en plastique de l’Allemagne au Portugal ou des oranges de l’Espagne à la Sicile, je me dis que cette injonction est d’un bon sens implacable.

Mais l’adepte du Swadeshi ne doit pas, selon Gandhi, rejeter un produit étranger seulement parce qu’il est étranger : la préférence communautaire, l’économie conviviale, n’ont rien d’une xénophobie.

Et Ashis Nandy, psychosociologue indien, nous dit : « Un autre modèle est possible. Il consisterait à renoncer à la puissance nationale et à accepter la frugalité. À la différence de la misère, la frugalité, est parfaitement tolérable : elle est l’essence même de la civilisation indienne. »

Enfin, comme nous l’avait dit Vinod, ingénieur à Bangalore, Abdul Kalam est un homme qui regarde vers l’avenir. Voulant transformer l'Inde en une nation développée, ses priorités sont: l'éducation et la santé, l'agriculture et l'industrie agro-alimentaire, les technologies de l'information et de la communication, le développement des infrastructures et l'autosuffisance des secteurs de base.

A ce stade là, je m’interroge, et nos dirigeants à nous, nos candidats à la présidence, regardent-ils eux aussi vers l’avenir, sont-ils des visionnaires ?
Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai comme un doute…

Pour le reste je ne sais pas grand-chose sur Abdul Kalam, j’attends de lire la traduction de Mohammed, en espérant qu’elle trouve un éditeur…

Video: Prof. Mohammed Siraj lit sa poésie « Amitié »

   
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Claudine Tissier & Fabio Campo