Un cimetière nommé Méditerranée

De 1988 à nos jours 15.638 personnes ont trouvé la mort en voulant rejoindre l’Europe.
710 victimes par an.
Presque deux par jour

Parce que l’Europe est devenue, pour qui a dû fuir son pays, chassé par la peur, la faim, les bombes, les massacres politiques ou ethniques,  une forteresse inaccessible et cruelle.
Nos états ont déclaré la guerre aux pauvres.

Et la Méditerranée, si belle sous le soleil, est devenue une gigantesque fosse commune.

Patiemment, jour après jour, le site de Fortezza Europa recense les morts.

En Méditerranée et dans l’Océan Atlantique, aux alentours des Canaries, 11.049 personnes se sont noyées,  6.566 cadavres n’ont jamais été retrouvés. Dans le canal de Sicile entre la Libye, l’Égypte,  la Tunisie, Malte et l’Italie, on compte 4.205 victimes dont 3.076 disparus. 184 migrants ont perdu la vie en naviguant entre l’Algérie et la Sardaigne. Parties de Mauritanie, du Sénégal, du Maroc ou de l’Algérie, vers les îles Canaries ou le détroit de Gibraltar,  4.548 personnes ont été englouties par les flots, parmi elles,  2.332 disparus.
Mer Égée, entre la Grèce et la Turquie 1.370 morts dont 824 disparus;
Adriatique,  604 noyés dont 220 disparus.
Océan Indien, au moins 624 migrants n’ont jamais rejoint l’île de Mayotte.

Embarcations fragiles, passeurs malhonnêtes ou assassins, tempêtes, famine, insolations ne sont pas les seules causes de cette monstrueuse hécatombe, d’autres migrants tentent de rejoindre l’Europe en s’embarquant sur des bateaux de ligne ou des cargos. Cachés dans des containers ou des recoins des cales. 150 d’entre eux sont morts par asphyxie ou noyade.

Avant d’arriver à la mer, de nombreux migrants africains doivent traverser le Sahara. Entassés dans des camions ou autres véhicules qui sillonnent les pistes entre le soudan, le Tchad, le Niger, le Mali, et la Libye et l’Algérie. Depuis 1996, on recense au moins  1.703 victimes. Selon les témoignages des survivants, à chaque voyage, il y a des morts.
Quant aux gouvernements libyens, algériens ou marocains, ils pratiquent depuis des années les déportations collectives de migrants, abandonnant des centaines de personnes dans le désert, livrées à elles-mêmes.

Chaque année, près de deux millions de clandestins transitent en Libye et le sinistre Kadhafi, entend bien rentabiliser la chose.
En 2008, il a signé avec Berlusconi  “traité d’amitié” stipulant que l’Italie investirait 250 millions d’euros chaque année pendant 25 ans pour équiper la Libye. En contre-partie, Kadhafi avait promis d’empêcher le départ de bateaux de migrants vers l’Italie et ses îles.
A la suite de cet accord, quelques 850 migrants ont été refoulés vers la Libye, au mépris de la Convention de Genève sur le droit des demandeurs d’asile.
Et maintenant, l’ogre libyen, qui n’est ni signataire de la Convention de Genève, ni de la Convention de l’Union Africaine (UA) qui oblige à coopérer avec les organisations internationales sur les questions d’asile et de migration, veut contraindre l’Europe à cracher au bassinet.
Face à 80 dirigeants européens et africains réunis à Tripoli les 29 et 30 novembre, Kadhafi a réclamé la bagatelle de cinq milliards d’euros aux Européens pour juguler le flux de migrants africains vers le Vieux Continent.

Juguler à sa façon, en enfermant, en affamant, en torturant

Monstrueux marché dont les produits sont des êtres humains et qui s’est discuté dans l’indifférence des médias et des populations occidentales.

Ces pauvres, les gouvernants européens n’en veulent pas et si l’accord avec Kadhafi n’a pas encore été signé ce n’est pas à cause de sa monstruosité mais à cause de son coût.
« Trop cher » a dit l’Union Européenne qui a déjà accordé 50 millions d’euros sur deux ans en aout dernier.
Si vous voulez stopper l’immigration clandestine, aidez la Libye“, a répondu le Libyen,  « sinon, la Libye ne sera plus le garde-côte de l’Europe“.

Et puis il y a aussi 365 migrantes et migrants qui ont perdu  la vie en tentant de franchir les frontières terrestres dans des camions, 244 qui se sont noyés dans des fleuves, 112 qui sont morts de froid en traversant à pied les montagnes et 92 autres qui ont explosé dans des champs de mines à la frontière turque.

Parmi ceux qui ont survécu au voyage, dans les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, au Maroc, en Gambie, en Égypte aux frontières israéliennes et entre l’Iran et l’Irak, 272 ont été abattus par la police.

Et si, finalement, ils posent le pied dans un pays européen, ils risquent, comme en France, d’être expulsés après avoir été enfermés dans des centres de rétention.

Pas de pitié pour les pauvres!

L’Europe s’enfonce dans un infect cloaque xénophobe. Quand Marine Le Pen fustige les musulmans, la foule applaudit et  Jean-François Copé enfonce le clou en préconisant de rouvrir l’odieux débat sur l’identité nationale. Et chacun de rajouter son  crachat, au bureau au bar ou sur son blog. Dangereux imbéciles qui ont depuis longtemps perdu le sens de l’humanité.

Désormais pour moi,  la mer
Qu’on voit danser le long des golfes clairs
A des reflets  de mort.

sources:  Fortress Europe,    France 24

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