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24.02.2007

Des nouvelles de la « Casa delle Mamme »

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Depuis le 29 octobre 2006, Deepthy, Mekha, Soorya, Sunila, Jincy, Jithin, Jibin et leurs quatre mamans vivent dans la “Casa delle Mamme” un projet de solidarité que nous avons monté en Inde avec un groupe d’amis et le soutien logistique de Namaste.

Ils ont abandonné leurs huttes de palmes insalubres, et se sont installés dans une vraie maison, avec des murs en pierre, un toit étanche et des salles de bains.Chacune des mamans a apporté le peu dont elle disposait, quelques casseroles, des tissus, un miroir lézardé.
Nous voulions acheter des lits mais elles ont préféré les paillasses que l’on étale sur le sol et sur lesquelles elles dorment avec leurs enfants.
Nous voulions leur acheter un réfrigérateur, élément indispensable de notre vie, mais personne n’en a vu l’intérêt.
Les courses sont faites chaque jour, au marché, et les repas préparés entièrement consommés, autrement dit il n’y a pas de restes, et jamais de gaspillage. Le seul aliment conservé d’un jour sur l’autre est le riz cuit qui est recouvert d’eau froide durant la nuit.
Les légumes sont à la base de l’alimentation, accompagnés d’un peu de poulet, d’œufs ou de poisson. Parfois les mamans font des chappattis, galettes de farine, pour accompagner les mets.
Les menus sont établis par Namaste qui fournit le lait, le riz et la farine. Nous avons décidé de faire ainsi dans un premier temps pour éviter d’éventuelles disputes entre les mamans, qui ne se connaissaient pas.
C’était d’ailleurs bien là toute la difficulté du projet, faire vivre ensemble ces quatre femmes. Nous ne voulions pas être trop directifs, ni imposer notre manière de concevoir la vie en communauté. Aider quelqu’un en souffrance n’est pas le contraindre à accepter d’autres choix que les siens. D’un autre côté, nous avons créé cette maison pour permettre aux enfants de vivre dans de bonnes conditions, d’aller à l’école, d’être suivis médicalement, d’avoir un jardin où s’ébattre et l’estomac plein, il fallait donc s’assurer que ces objectifs étaient atteints.

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C’est Sasikala, qui a été chargée de superviser le projet. Elle a aidé à l’installation et passe plusieurs fois par semaine s’assurer que tout va bien.

Dans la journée les mamans vont travailler à la fabrique de cahiers de Namaste et les petits vont à l’école.

Bon, il y a eu des anicroches.

Susheela, la maman de Mekha, s’est longtemps tenue volontairement à l’écart du groupe, passant l’essentiel de son temps dans sa chambre avec la fillette à qui elle interdisait de jouer avec les autres enfants. Impossible de savoir pourquoi. Sasikala a suggéré un problème de caste. Susheela est catholique, mais même au sein de l’église chrétienne, le système des castes perdure. Il est lié au métier. Avant de venir dans la « Casa delle Mamme » Susheela ramassait les ordures et vivait sous un auvent.
La situation semblant ne pas bouger Sasikala s’est installée quelques jours dans la maison et peu à peu les choses ont évolué. Susheela a accepté de sortir de sa chambre et Mekha peut désormais jouer avec les autres.

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Mais voilà que maintenant c’est Sheeja, la maman de Jincy, Jithin et Jibin qui n’est pas contente. La quantité de travail ménager a été stabilisée en fonction du nombre d’enfants de chacune, et Sheeja s’estime exploitée. De nouveau, Sasikala va devoir intervenir.
Moralité : rien n’est simple.

Les petits par contre, vont très bien comme en témoignent les photos de la fête de Noël. Ils sont joyeux et en bonne santé.

Et leurs sourires parlent pour eux.
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Water, le superbe de film de Deepa Mehta, dont je vous avais parlé il y a quelques semaines a été sélectionné pour l’Oscar du meilleur film étranger. Il évoque la terrible condition des veuves indiennes, mises à l’écart dans des ashrams. Cette pratique, même si elle tend à disparaître, est malheureusement encore en cours dans l’Inde d’aujourd’hui, et la réalisatrice a été très violemment attaquée par des membres du BJP, parti hindouiste ultra conservateur. Il existe des villages de veuves où celles-ci, abandonnées de tous, survivent grâce à la mendicité. Lorsque le mari meurt les veuves sans enfants deviennent des bouches inutiles pour leurs belles familles, mais, parfois, ce sont les enfants eux-mêmes qui se débarrassent de ces mères âgées dont ils ne veulent pas assurer la charge.
Globalement, la société indienne change, mais, dans certains états ruraux, la condition féminine reste extrêmement pénible.
Comme beaucoup de femmes pauvres, les mamans que nous aidons ont toutes été abandonnées par leur mari et leur sort est misérable.
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20.02.2007

Premier souvenir

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C’est dans une chambre inconnue, la fraîcheur d’un carrelage sous mes pieds nus, l’odeur de la poudre de riz, son nuage rose.
C’est le goût amer d’un bâton de rouge à lèvres dérobé sur une commode.
C’est léger, rapide, fugitif, c’est une sensation, une image qui s’anime et disparaît.

J’ai trois ans et nous sommes en vacances quelque part sur la côte atlantique. Mes parents ont loué pour un mois un appartement dans une villa qui s’appelle « Le Yoyo ». De l’autre côté du couloir, s’est installée pour l’été une autre famille, avec deux petites filles, comme Annie et moi.
Guidées par l’aînée des fillettes, nous nous sommes glissées dans la chambre de leurs parents et nous jouons avec les produits de beauté.
Nous nous tartinons de rouge à lèvres.
Nous soufflons dans la poudre de riz.
Nous nous aspergeons d’eau de Cologne.

Mais, alertés par nos rires, les parents font irruption. Ma maman n’est pas contente, elle nous gronde et nous ramène prestement chez nous.

Dans le jardin, suspendue à un arbre, il y a une balançoire, et, fière de mon exploit, je me tiens debout sur l’escarpolette, pliant les genoux pour aller toujours plus haut, le corps arqué, les mains fermement agrippées à la corde. Je vole.

Dans la journée nous allons à la plage. Le matin, l’océan est au loin et nous jouons dans les flaques d’eau qu’il a abandonné sur le sable humide. J’ai un seau plastique que je m’acharne à remplir, nantie d’une petite pelle. Puis je transporte mon butin quelques mètres plus loin et déverse son contenu avant de recommencer, inlassablement.

L’après-midi, sur la plage devenue toute petite, l’océan rugit et ses vagues se fracassent lourdement, provoquant des nuages d’écume.
J’ai peur et me garde bien de m’approcher de cet étrange monstre mouvant et bruyant.
Ma peau claire supporte mal le soleil, je suis toute rouge, puis couverte de minuscules boutons qui me démangent, alors ma mère me badigeonne de crème et après le sable colle à ma peau et c’est encore pire qu’avant.

En fin d’après-midi nous nous promenons en ville, et là, merveille des merveilles, il y a un manège.
Mon premier manège.
Dignement assise dans une voiture, emportée par les flonflons, étourdie par le mouvement, je ne vois pas la queue du Mickey qui danse devant mes yeux.
« Attrape, attrape ! » crient mes parents à l’arrière. Un tour de manège gratuit est la récompense et les autres bambins, y compris Annie, s’agitent frénétiquement pour décrocher ce modeste trophée.
Tous sauf moi qui n’ai pas compris l’importance de l’enjeu.
Mais le Monsieur du manège, séduit par mes bouclettes blondes et ma mine angélique, a décidé de faire gagner. Constatant que ses manœuvres d’approche me laissent de glace, il quitte sa cahute, saisit la corde au bout de laquelle s’agite la queue du Mickey et me l’enroule autour du cou. Tout le monde rit. Moi aussi, par mimétisme et j’ai droit au tour gratuit. Mais pas ma sœur qui du haut de ses cinq ans manifeste si bruyamment son mécontentement devant telle injustice que papa doit acheter pour elle un second ticket.
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Et vous, votre premier souvenir?

18.02.2007

Around Vang Vieng (2)

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La terrasse du resort donne sur la Nam Song, la rivière qui traverse Vang Vieng, et nous passons beaucoup de temps à regarder nager et s’ébattre les enfants et à observer les allées et venues des pirogues qui remontent, descendent le cours d’eau ou le traversent. Le pont de bambou qui reliait les deux rives a été emporté par les flots il y a quelques mois, et n’a pas été reconstruit. La traversée se fait en pirogue, et demande une certaine expérience car le courant est très fort. Ne pouvant traverser suivant une ligne droite, la pirogue décrit une longue courbe avant de se laisser dériver pour arriver au point voulu, elle glisse sur l’eau en une arabesque silencieuse, qui, dans ce cadre grandiose, prend une dimension presque magique.
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La nuit, les lampes de fortune qui éclairent les embarcations semblent danser dans l’obscurité comme de gracieux esprits.
Le Lonely Planet indiquant de l’autre côté de la rivière, à peu de distance, une grotte à visiter, nantie d’une vasque d’eau fraîche faisant office de piscine naturelle, nous louons des vélos et partons à l’aventure.
La première consiste à embarquer avec les vélos sur la fragile pirogue qui tangue au moindre mouvement. Sur l’eau, l’impression d’être irrésistiblement portés par le courant est fascinante et la tâche de l’homme qui guide l’embarcation loin d’être facile, si la trajectoire qu’il choisit n’est pas parfaite, le bateau risque de trop dériver et de manquer son but.
Nous enfourchons nos bicyclettes et pédalons sur une route de terre qui, en principe, doit nous mener à la grotte.

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 Fabio a un genre de VTT et moi une espèce de mini vélo rose sans changement de vitesses ce qui fait que dans les côtes je m’époumone et ahane. Mais ce n’est pas le pire, il a plu récemment et la route est souvent coupée d’énormes flaques d’eau boueuse. Je me lance dans la première sans bien mesurer les conséquences de ce mouvement hardi et me retrouve immergée jusqu’aux genoux, la parole « bilharziose » me trottant mine de rien dans la tête. Encore une de ces maladies parasitaires que le monde occidental ne connaît pas mais qui fait des ravages sous les tropiques, surtout dans les pays, comme le Laos, où les structures sanitaires sont presque inexistantes.

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Quant à moi, une fois passée la première flaque, je décide qu’il ne sert à rien de me gâcher le plaisir, d’autant que, tandis que j’extirpe péniblement ma bicyclette rose de la mare boueuse, une paysanne, pieds nus et un panier sur la tête, la traverse vaillamment, non sans nous jeter un petit regard amusé.
Contrairement à moi, qui suis là pour occuper mes loisirs, et qui peut, à tout moment, reprendre un avion qui me mènera dans mon occident aseptisé, elle n’a pas le choix.
Nous continuons notre route, traversant une campagne magnifique, où le vert acidulé des rizières chatoie sous le soleil.

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Le soleil qui justement tape fort sur nos crânes, trop fort, beaucoup trop fort, surtout que j’ai oublié mon bandana. Pour tout dire la ballade commence à devenir un peu pénible, les flaques d’eau se succèdent, il fait une chaleur impressionnante et au bout d’une heure toujours point de grotte ni de cascade.
A ce stade là, il s’agit, ce qui est toujours délicat, d’évaluer si l’effort accompli mérite d’être continué afin d’avoir le plaisir d’arriver au but, ou si la sagesse se trouve dans le renoncement. Généralement, comme la plupart des humains, nous n’aimons pas penser que nous faisons les choses pour rien, nous aimons bien que notre effort soit gratifié, même si le but est dérisoire.
Par conséquent, nous nous acharnons. Une demi-heure plus tard, le nez dans le guidon, les jambes en compote, rouges et transpirants nous arrivons à la fin de la route. L’unique possibilité pour continuer est un chemin boueux, impraticable en vélo, ce qui signifie, comme nous n’avons pas d’antivols, qu’il faudra les porter. Finalement la raison l’emporte et nous choisissons de faire demi-tour.
Bien nous en prend, car quelques minutes après que nous ayons commencé à pédaler sur le chemin du retour, le ciel qui était bleu devient gris, puis noir, et bientôt éclate un monumental orage.
La pluie gicle et rebondit, les éclairs zèbrent le ciel et le fracas du tonnerre se répercute dans les montagnes.
Pédalant de toutes mes forces je roule, ô horreur, sur le cadavre d’un serpent, que, par chance, je n’avais pas remarqué à l’aller.
Nous atteignons finalement, trempés et tremblants, un hameau où une famille nous fait signe de venir nous abriter sous un auvent.

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Faute d’avoir un langage en commun, nous échangeons des sourires, des gestes. Les enfants jouent autour de nous, comme beaucoup de petits laotiens, ils ont le nez qui coule, et ils toussent.
Nous restons chez eux, le temps que l’orage se calme. C’est une famille pauvre, ils doivent avoir un champ, quelques poules, ils nous regardent avec une curiosité bienveillante et amusée.
Nous échangeons de grands saluts avant de repartir sur la route inondée, de traverser à nouveau la rivière et de retrouver le confort de notre resort.

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Et ci-dessous, la même chose en vidéo :

11.02.2007

Around Vang Vieng (1)

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Fourbus, moulus, assoiffés, le bus cahotant nous dépose sur le terre plein qui fait office de gare routière pour la petite ville de Vang Vieng.
Nous y avions déjà fait halte il y a une semaine, en allant  Luang Prabang. Cheminant sur la route en  terre vers le « resort » où nous avions dormi, un ensemble de bungalows disposés sur une impeccable pelouse donnant sur la rivière, le tout tellement bien rangé, ordonné, entretenu qu’on se croirait au bord du lac Léman, tenu par un charmant monsieur francophone et francophile qui le soir prend sa guitare pour chanter du Brassens, un couple de trentenaires, et des poussières,  français, nous double à grands pas énergiques, dans l’intention, visible, d’arriver avant nous au « resort » en question, sait-on jamais, il n’y a peut-être qu’une seule chambre libre.
La démarche assurée, vêtus Décathlon de la tête aux pieds, c'est-à-dire short un peu long (ou bermuda un peu court), pataugas, veste en coton imperméabilisé multi poches, ceinture anti voleurs et sac à dos ils sont tout à fait représentatifs d’un certain type de touristes : les efficaces.

Ils voyagent avec un attirail complet, ont un goût particulièrement marqué pour la marche et adorent les trekkings dans les villages, histoire de partager très très brièvement le quotidien des paysans, de dormir à la dure dans une cabane et de s’en repartir le lendemain, le cœur léger, vers d’autres aventures sans trop se poser de questions sur les insignifiantes retombées économiques de l’opération dans l’escarcelle de leurs hôtes. Le pactole étant bien sûr empoché par l’agence touristique qui a organisé l’expédition. Le touriste efficace transportant ses petites affaires bien pliées dans un sac à dos déjà plein, pas question non plus pour lui d’acheter quoique ce soit dans les villages. Bref, les efficaces, de surcroît toujours prêts à manifester leur mécontentement si un cafard traverse leur chambre ou si les draps ne sentent pas la lavande, me sont généralement peu sympathiques.
Ces deux là, qui se tournent triomphalement vers nous sur le seuil du resort en nous lançant un regard signifiant clairement « On a gagné » n’échappent pas à la règle, mais, peu importe, nous, nous avons réservé notre chambre.

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Plus tard nous sortons dans Vang Vieng. Les rues bordées de maisons basses et de cabanes sommaires sont encombrées de triporteurs, de mobylettes et de vélos. De nombreux enfants jouent et se poursuivent joyeusement devant les échoppes peu achalandées. Au marché, les paysannes vendent le produit de leurs récoltes, du poisson odorant, des volailles, d’autres étals proposent des tissus, des chaussures, des objets quotidiens.

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La petite ville  est renommée comme étant un haut lieu du trafic d’opium et les fumeries clandestines y sont nombreuses, ce qui est bien sûr totalement illégal, mais le Laos, situé au cœur du triangle d’or, en est depuis très longtemps un pays producteur et consommateur ainsi qu’un pays de transit pour l’héroïne. Il fut longtemps, après l’Afghanistan et le Myanmar, le troisième producteur mondial.
Le pavot est cultivé, de façon archaïque, par les tribus montagnardes qui vendent, échangent contre d’autres denrées, et consomment l’opium, en particulier à des fins médicales.
En l’absence de tout système de santé primaire, l’opium est bien souvent le seul médicament disponible dans les montagnes. Le système de santé laotien est très nettement insuffisant, dans les provinces, les hôpitaux, situés à plusieurs jours de marche des villages, sont dans un état d’extrême dénuement. Les paysans utilisent donc l’opium à des fins thérapeutiques, ce qui crée des dépendances à la drogue.

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Depuis quelques années une vaste campagne d’éradication du pavot a été lancée avec le soutien de l’ONUDC, la production et la consommation d’opium ont baissé, mais la situation reste très fragile car les paysans doivent combler le manque à gagner en pratiquant d’autres cultures, suffisamment lucratives. Dans un cas comme dans l’autre les bénéfices des paysans restent, de toute façon, très faibles.

Ce n’est certes pas aux petits paysans laotiens que profite le marché de l’héroïne, eux survivent, vivotent et consomment pour oublier leur misère.

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Toujours est-il que la réputation opiacée de Vang Vieng attire dans ses gargotes et ses terrasses sur le fleuve une autre catégorie de touristes occidentaux : les routards à la recherche d’émotions fortes.

Arborant un look de vieux baba, d’un âge variable, le routard à la recherche d’émotions fortes fume des joints sans la moindre discrétion, deale avec les laotiens, s’endort affalé contre un arbre et fait des pieds et des mains pour pénétrer dans les fumeries clandestines. Ce qui n’est pas facile, celles-ci étant réservées aux autochtones, et souvent gérées par des chinois, qui ne voient pas d’un bon œil ces rejetons du monde occidental venus perdre raison et dignité sur leur territoire.

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Le patron du restaurant où nous dînons est chinois justement. Vieux et gras il est assis face à sa femme, une dame maigre et pincée. Ils boivent le thé que la petite bonne leur a servi.
Adolescente aux yeux tristes, elle est une de ces innombrables filles placées ou vendues par leurs familles pour servir chez les autres. Elles sont des millions dans le monde, petites esclaves exploitées, souvent battues, parfois violées, qui n’ont ni identité ni espoir et qui mènent, sans se plaindre, une obscure vie de labeur.

A suivre


08.02.2007

Indifférence

On dit aussi fermer les yeux, rester les bras croisés, être spectateur.
Il me semble qu’elle gagne du terrain. Elle se répand dans les consciences anesthésiées, les esprits las, les énergies rompues.

Deux anecdotes pour illustrer mon propos, elles se sont déroulées à Bologne (d’où les photos), mais ne sont en rien typiques de cette ville, n’importe quelle cité occidentale aurait probablement pu en être le cadre.
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La vieille dame et le raciste :

Le bus est presque plein et quand la veille dame grimpe péniblement à son bord il ne reste plus qu’une seule place assise, sur laquelle elle se laisse tomber en soupirant avant de poser sur ses genoux des sacs pesants.
Elle est noire.
Elle est pauvre.
Ses cheveux sont cachés par un foulard.
Elle boîte.
Son visage est triste et fatigué.

Mais, alors que le bus démarre, le voisin de la dame se met à grommeler.
De là où je suis, je ne comprends pas ce qu’il dit mais je vois la vieille dame se recroqueviller, se tasser, s’enfoncer peu à peu derrière ses paquets.
Autour d’eux personne ne bouge.
L’homme parle de plus en plus fort, j’attrape au vol le mot « putana », puis « stronza ».
Les passagers, le regard lointain et la mine absorbée, font mine de ne rien entendre.
Qu’à cela ne tienne, l’homme a des ressources, il se met à crier « negra di merda !»

Le bus s’arrête, un passager descend, tout en éructant des « vaffanculo » agressifs, l’homme se précipite sur la place libre.
Je me lève et je vais m’asseoir à côté de la dame.
Elle tremble.
Je pose un instant ma main sur la sienne.
L’homme ouvre la bouche, probablement pour vomir une nouvelle injure, me voit, se ravise et tourne la tête de l’autre côté, puis se lève à nouveau et s’enfuit à l’avant du bus.

Il suffisait de bien peu pour le faire taire.

Côté passagers, c’est toujours le calme plat, l’apathie, seule une petite mémé m’adresse un sourire, les autres n’ont apparemment rien vu, rien entendu, il ne s’est rien passé.
Le bus continue sa route.
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Les passants et la droguée :

Samedi, jour de marché à Bologne. La foule baguenaude.
Alors que j’arrive à la place, un jeune homme m’interpelle. Il est à côté d’une voiture dont la porte est ouverte et tient à la main une bouteille vide. Il me demande si je sais où l’on peut trouver de l’eau. En lui répondant que je ne sais pas je vois, assise dans le véhicule, une jeune fille qui me semble très mal en point, elle est livide, ses yeux sont clos, elle respire avec difficulté.

Il a suivi mon regard. « C’est rien, dit-il, elle a trop mangé, elle a besoin de boire ».

Je m’approche de la jeune fille, son teint est verdâtre, elle suffoque, je me rends compte qu’elle est inconsciente.
Lui est complètement incohérent, il bafouille, tremble.
Je lui dis qu’elle va très mal, qu’il faut l’emmener à l’hôpital. Il refuse et me ressort son histoire de repas mal digéré.
Elle râle, elle bave, sa tête pend sur sa poitrine. Sans être spécialiste je devine un problème de drogue.
Elle a besoin d’être immédiatement secourue.
J’interpelle les passants « A l’aide ! Cette jeune fille est très mal, il faut appeler les secours ».
Personne ne s’arrête.
Pendant que je m’évertue à attirer l’attention de la foule qui défile sur le trottoir, le garçon entreprend de sortir la jeune fille de la voiture. Elle est totalement apathique, il la traîne sur le trottoir, son pull remonte découvrant son soutien-gorge.
J’interviens, je l’aide à la porter sur le capot où elle s’effondre comme un sac de cendre, je n’entends plus sa respiration. Tout en continuant à héler les braves bolognais qui se rendent au marché je remets ses vêtements en place, en frissonnant au contact de son corps glacé. J’ai peur qu’il ne soit déjà trop tard pour la sauver.
Je crie « A l’aide, vite, elle va mourir ! »
Une femme s’arrête « Pffft ! C’est une droguée ! » Et repart sans se retourner.

Je ne sais plus quoi faire, le jeune homme tourne autour de moi en répétant, dans un verbiage quasi incompréhensible, que le repas était lourd à digérer.

Finalement, un couple se précipite. La femme est infirmière, tandis que son mari appelle une ambulance, elle ausculte la jeune fille.
« Non elle n’est pas encore morte, me dit-elle, mais il n’y a pas une minute à perdre »

L’ambulance arrive.

Samedi, jour de marché à Bologne, la foule baguenaude.

« Ce qui m'effraie, ce n'est pas l'oppression des méchants ; c'est l'indifférence des bons. »
Martin Luther King

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04.02.2007

Quand j’étais maîtresse (2)


Naïma


Ce ne sont pas des larmes mais des flots déchaînés, des fleuves en crue qui se déversent sans fin, sans mesure, dévastant son visage de madone. Elle suffoque et se répand, par le haut, par le bas, par la bouche, le nez, le ventre.
Et telle est l’ampleur de ce chagrin que nul n’ose bouger, que nul n’ose parler et que tous la regardent, figés.
Elle est la douleur.
Elle pleure, intarissable source de désespoir.
Elle pleure et j’en frissonne…
C’est malheureusement habituel et je ne sais pas le pourquoi de cette incommensurable peine.
J’ai parlé avec Naïma, avec le père de Naïma : «Elle est très sensible ma fille, à la maison aussi ... ».
J’ai questionné.
« Non y a pas de problèmes, tout va bien, elle est heureuse ma fille, elle est sensible, elle aime pas la cantine... Sa mère aussi elle est sensible... les femmes quoi...»
J’ai parlé avec la mère de Naïma : « Elle aime pas la cantine. Elle est sensible. Et pis y a les petits, j’ai pas beaucoup de temps pour m’occuper d’elle... »
Et oui, Naïma a trois petits frères...
    
J’ai parlé avec la maîtresse de l’année dernière: « Ça m’étonne, elle était tellement joyeuse dans ma  classe ! »
Le travail en équipe est un art extrêmement délicat et je n’ai pu obtenir de ma collègue autre chose que de lourds sous-entendus indiquant que j’étais vraisemblablement la seule et unique cause de ce désastre.
Bon d’accord, je ne suis pas parfaite, il peut m’arriver de parler fort, de vitupérer, voire même de crier mais de là à provoquer un tel cataclysme !
J’ai pris note, après tout il n’est jamais vain de s’interroger sur soi-même.
J’ai parlé avec la responsable de la cantine : «Oui, Naïma pleure, à la cantine, et au centre aéré du mercredi, oui l’année dernière aussi... non on ne sait pas pourquoi, et puis ce n’est pas tout le temps. On s’est renseignés, apparemment il n’y a pas de problème, c’est difficile d’en savoir  plus... »
Et puis quand Naïma pleure, au centre aéré, un animateur vient s’en occuper, on la dorlote, on lui parle, on a le temps…
    
Pas  moi.
Je suis seule, ils sont vingt-cinq.
Et Naïma pleure.
Naïma vomit son désespoir.
    
Je ne sais pas pourquoi. Mais je sais que Naïma, ses parents et les trois petits frères vivent dans deux pièces. Je sais qu’elle est l’aînée, la seule fille, qu’elle doit aider. Je sais la tristesse de sa mère, sa jeunesse si vite éteinte. Je sais la nervosité du père, ses colères, ses cris, trop d’heures de travail, pas assez d’argent, trop de responsabilités, pas assez de temps, et cette belle femme qui pleure et cette enfant qui pleure aussi…
    
C’est vrai, elle ne pleure pas tout le temps, elle pleure parfois.
La première fois j’ai tout essayé, ou presque tout.
Je l’ai prise dans mes bras, je l’ai serrée contre moi, elle a arrêté de pleurer, j’étais  contente.
Je l’ai lâchée.
Elle a recommencé.
Moi aussi.
Elle a arrêté.
Je l’ai lâchée.
Elle a recommencé.
J’ai pensé : «On ne va pas passer la matinée comme ça ! »
Je l’ai laissée pleurer.
Elle a pleuré si fort que la classe était remplie par ses sanglots, si fort que je ne pouvais plus parler.
Je l’ai accompagnée aux toilettes, je lui ai donné à boire, je l’ai débarbouillée, je lui ai fait un bisou, je l’ai ramenée à sa place.
Elle a recommencé.
Les autres s’impatientaient, on s’habitue à tout, même à tant de souffrance.
J’ai tenté de la raisonner: «Enfin  Naïma, tu es une grande fille, plus un bébé, il faut me dire pourquoi tu pleures, quelqu’un t’a embêtée ? Tu as mal quelque part ?  Non ? Alors arrête de pleurer comme ça, Naïma, tu m’entends ? Tu peux avoir confiance en moi, parle moi !»  Peine perdue.
J’ai essayé de la faire rire.
Je lui ai proposé, gentiment, d’aller voir le directeur, le cher homme, porteur d’un don divin ou supposé tel, magnétise les bobos, (l’éducation nationale est un vaste  fourre-tout, on y trouve un petit peu de tout, y compris des guérisseurs) bref, le magnétisme étant aussi une marque d’intérêt bienveillante, pourquoi pas ?                                    
Elle a fait non avec la tête.
    
Je lui ai proposé, à contre cœur, d’aller voir la maîtresse de l’année passée (cette garce est aussi la directrice de l’école maternelle et la femme du directeur magnétiseur).
Elle a dit non avec sa bouche et moi j’ai pensé « Tant mieux ! ».
Alors j’ai proposé en vrac: les petits frères, le cuisinier, les  femmes de ménage… et toutes les personnes de l’école qui me sont naturellement sympathiques...
Elle disait toujours non.
Je me suis fâchée :
«Bon, maintenant ça suffit, on ne vient pas à l’école pour pleurer, tu es une grande fille. Alors tu arrêtes, tu te calmes et tu travailles, comme tout le monde, sinon tu vas pleurer dans l’atelier toute seule parce qu’on a plus envie de t’entendre... »
Elle s’est levée, titubante, elle est sortie de la classe, elle s’est assise dans l’atelier,  elle a pleuré, pleuré, pleuré...
Et moi j’ai craqué.
Je suis allée la chercher, j’ai pris sa main brune et je l’ai gardée, et puis j’ai expliqué la leçon, sa petite main moite recroquevillée dans la mienne.
Elle ne pleurait plus.
J’avais peur de la lâcher, elle aussi avait peur, parfois ses doigts se crispaient contre ma paume. Elle me suivait, docile, anesthésiée.

Et puis, comme un rayon de soleil après la bourrasque, elle m’a souri. Elle a lâché ma main, elle est retournée s’asseoir à sa place et elle a ouvert son cahier.     

Alors maintenant, quand Naïma pleure, je ne passe plus par toutes ces étapes, je compte une minute, on ne sait jamais, puis je lui tends la main.

Donc, ce matin, je ferai classe avec Naïma.

Parfois la ballade est de courte durée, dix ou quinze minutes, parfois elle dure une heure, aujourd'hui, compte tenu de l’incident Laura, je ne suis pas optimiste...

01.02.2007

Quand j’étais maîtresse (1)

 

Laura 

8h30, mardi classe de C.P.

Laura pleure, sans bruit. De grosses larmes ruissellent sur ses joues. Son nez coule.  Elle renifle. Laura a mal, mal au ventre ou au genou. Elle se lève, titube jusqu’à moi, enfouit son visage mouillé dans ma robe, s’arrime à mon ventre, crispant ses petits doigts sur le tissu.
Je la berce.
« - Laura, Lolo, qu’est ce qu’il a ? Tu as mal quelque part ?
-Mmf... mmf ... au… au… au… mmf ventre ... »

Je m’en doutais bien.
« - Tu as mangé ce matin ? Tu as fais caca ?
- J’ai pas... mmf... mmf... mmf... man-mmf-gé...
- Tu as dit à maman que tu avais mal au ventre ?
- Nooon... maman ce matin elle a pleuré... »

Silence de la part de Laura, le reste de la classe aurait plutôt tendance à s’échauffer, puis la petite voix, hoquetant :
« - Hier papa il a cassé l’armoire de Ben à coups de pied et pis... mmf... mmf... et pis, il l’a frappé… et pis Ben il a pleuré mmf... mmf... et maman aussi elle a dormi sur le canapé... et pis ce matin elle a dit qu’elle voulait divorcer... »
Encore !
Je tente de l’apaiser.
« - Et toi tu t’es fait du souci pour maman, et pour Ben, tu as eu peur, c’est normal d’avoir peur, mais peut-être c’est ça qui te fait mal au ventre, la peur. »

Je frotte son ventre avec ma main, doucement, en cercle… peu à peu sa respiration se calme, je continue mon discours:

« - Je sais que toutes ces choses sont très difficiles à vivre. Les histoires des grandes personnes sont parfois très compliquées, mais toi, Laura, tu es une petite fille adorable, et je suis sûre que ton papa et ta maman t’aiment beaucoup, et ce n’est pas à cause de toi qu’ils se disputent. Maintenant, il faut que tu sois grande et courageuse, il faut arrêter de pleurer, aller t’asseoir à ta place, et travailler. Je ne peux pas passer la matinée à m’occuper seulement de toi, tu vois les autres ne sont pas sages, et puis si tu restes agrippée à moi je ne peux même pas marcher, tu te rends compte de quoi ça a l’air une maîtresse qui ne peut pas marcher ? »
Elle m’adresse un misérable petit sourire.

OUF !
    
Enfin, presque parce que les autres sont en effet loin d’être sages !
Pierre et Arnaud, debout, s’affrontent la règle à la main. Olivia et Marina se disputent à grands cris un feutre fluo qui vient-de-ma-maison-c’est-ma-maman-qui-me-l’a-donné-tu-peux-lui-demander, argument irréfutable, employé simultanément par les deux protagonistes. Clara, dressée sur sa chaise adresse à la foule un interminable et incompréhensible discours que de toute façon personne ne cherche à comprendre. Malik, profitant de l’ambiance chaude du moment, tente de s’emparer du paquet de chips d’Ycham, celui-ci, s’apercevant subitement du larcin, se jette désespérément sur son bien et tire, de toutes ses forces, le sachet se déchire, les chips se répandent sur le sol. Alexandre, renversant sa chaise, se précipite pour les manger.
Il est 8h45.
Ca suffit.
Je soulève Laura et je la pose à sa place. Je dis, fort :
« Bon maintenant c’est terminé, Marina assise, le feutre je le garde, je vous le rendrai quand vous serez d’accord, Arnaud et Pierre, vous posez les règles sur mon bureau, ce ne sont pas des armes, et puis de toute manière ici on a pas le droit de se battre, Malek je suis très fâchée, j’ai très bien vu ce que tu as fait, et c’est très vilain, alors tu vas aider Ycham à ramasser ses chips ensuite tu sortiras ton cahier rouge pour que j’écrive une punition. Alexandre tu vas  t’asseoir… »
    
Petite pause.
« Silence, tout le monde ! Bras croisés, tête sur les mains ! Une minute de repos sur la table ! Non Rémi je n’ai pas dit les mains sur la tête, j’ai dit la tête sur les mains, pour se reposer ! Voilà, comme ça, parfait ! ».
Je continue à parler en baissant la voix, je leur explique que puisque maintenant ils sont très sages on va pouvoir travailler.
Le calme...
Presque le silence...
Manu distribue les cahiers, esquivant habilement les pieds tendus et les doigts crochus. Il se trompe de Kevin (y en a deux, merci le cinéma américain) rectifie, commente sa méprise à voix haute. Chacun sort son matériel : feutres et crayons mâchonnés, dévorés, les traces des dents gravées dans le bois et le plastique,  stylos aux pointes écrasées, tordues, avachies, stylos vides et stylos fuyants « Maîtresse y coule partout y en a plein mon cahier ». J’opère une rapide vérification des outils de travail, il faut avoir l’œil à tout.
Les cahiers sont ouverts, les bras sont croisés, 40 yeux me regardent, les propriétaires des 10 autres ont d’autres soucis, je ne me plains pas, 20 auditeurs de 7 ans attentifs et disponibles en même temps c’est presque un record.

Comme chaque matin je vais écrire au tableau une phrase, leur phrase, collective ou individuelle, selon l’humeur, la phrase du jour. Ce matin, influencée par le chagrin de Laura, la discussion s’engage sur le douloureux terrain des rapports familiaux. Chacun y va de sa complainte. Malheureusement, excepté les vantards désireux d’apporter une fausse contribution au désarroi , les autres n’expriment que la triste vérité : parents violents, alcooliques, tristes, démunis, excédés, les coups et les injures qui paralysent les enfants, les larmes des mères.

Je compte 5 minutes, pas une de plus, 5 minutes de leurs vies quotidiennes,  l’école c’est aussi fait pour oublier.

Je tranche. La phrase sera simple : « Ce matin, Laura est très triste ».

Les enfants épellent les mots, on en profite pour réviser les sons, l’ambiance est décontractée, mais néanmoins studieuse, tout baigne, petit moment d’autosatisfaction...
Ils copient.
Ils copient.
Le silence...
Le silence...
J’arpente la classe.

Ils aiment écrire, sécurisés par les grosses lignes, absorbés par le geste de la calligraphie, pour la plupart consciencieux, pour la plupart indifférents au sens des mots, ils copieraient tout aussi bien de l’anglais ou de l’italien, très peu font le lien entre l’écrit et l’oral. Le sens leur échappe ou plutôt, ils ne se posent pas la question du sens. Ils écrivent, entièrement voués à cette tâche qui efface tout le reste...
Ils écrivent, penchés, tordus, le nez sur le cahier, la main sous la table…
Je les redresse, les encourage, tout travail doit être reconnu, les plus maladroits recommenceront, les cochons et les trop-rapides aussi, il faudra attendre les lambins... Mais tous ont, malgré tout, le souci de bien faire, l’envie de réussir, d’être félicités. En début d’année, le critère rapidité prévalant sur tous les autres, ils faisaient la course, maintenant ils savent que maîtresse « œil-de-lynx » n’aime pas les excités de l’écriture.
Le calme.
Le silence.
Bien être.
    
Puis un sanglot, énorme, incongru, gigantesque : Naïma pleure…

 

à suivre 

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