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13.12.2006

Ko Lanta, le lendemain du tsunami



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Aux premières lueurs d’une aube nouvelle, le sifflement ininterrompu d’un insecte nous extirpe d’un sommeil léger et agité. Nous avons très peu dormi.
Les yeux clos, je revoyais encore et encore les vagues déferlantes, j’entendais leur rumeur, je courais à nouveau pour leur échapper.
Hier matin, la gravité de l’événement m’avait totalement échappée, et à aucun moment, l’idée d’un raz-de-marée ne m’avait effleurée.
Pourtant, mon imaginaire en était plein, de raz-de-marée, leur idée fut une des peurs de mon enfance. Je voyais un mur d’eau, irrésistible, haut comme un immeuble, s’abattre sur le rivage, renverser les maisons, ensevelir des villes entières.
Dans mon livre de lecture du CM2, il y avait l’histoire d’un chinois qui se réfugiait sur une montagne pour échapper à un raz-de-marée, et, de là haut, il voyait l’eau détruire sa maison, ruiner ses récoltes, emporter les arbres.
Mais quand le tsunami est arrivé, je ne l’ai pas reconnu !
Cette nuit, allongée sur le sol, grelottant dans une couverture, les paupières lourdes et la tête douloureuse, j’ai revécu, indéfiniment, ces quelques minutes où l’océan aurait pu nous emporter.
J’étais inquiète aussi pour tous ceux, comme Kun, qui avaient choisi de passer la nuit sur le bord de mer.
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Nous buvons un mauvais café au restaurant. Le camp a du mal à sortir de la torpeur.

Comme il n’y a plus d’eau au robinet, nous ne pouvons pas nous laver.
Nous n’avons pas de vêtements pour nous changer.
Les toilettes débordent.
Nous avons dormi par terre.
Nous avons faim.
Nous sommes exténués.

Je pense aux millions de réfugiés à travers le monde, à ceux qu’on appelle, « les personnes déplacées », eux ne passent pas une nuit à la dure, mais des mois, parfois des années, à dormir sur le sol, sous une fragile tente que le vent peut abattre, à prendre l’eau à la fontaine, ou au camion de l’ONG qui passe, à être privés de tout, à ne rien n’avoir.

Nos capacités de résistance sont extrêmement faibles mais notre égoïsme, qui fait que nous, les nantis occidentaux, oublions facilement toute cette humanité qui ne vit qu’à demi, est énorme.

Il suffit d’un rien pour basculer dans autre chose.
Un rien.
Une vague.
Une guerre.
Un tremblement de terre.
Une épidémie.

Vers 9 heures nous décidons que rester sur la colline n’a pas de sens et qu’il est mieux de retourner au resort.

Malheureusement il s’avère difficile de trouver un véhicule, tous ont déjà été réquisitionnés par les touristes qui se précipitent éperdument vers Bangkok pour regagner leurs pays.

C’est la fuite.

Finalement un van s’arrête, à son bord un Italien et sa compagne, une jeune femme thaï. Le type est odieux, lui, il n’envisage pas de rentrer, mais de poursuivre vers le nord son voyage, l’idée de prêter main forte aux sinistrés ne l’a même pas effleurée, ce n’est pas son problème.
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Nous arrivons chez Kun, le nettoyage a déjà commencé. La cuisinier, assis sur la terrasse d’un bungalow, essuie un par un les CD, Ho balaie avec la jeune canadienne, Kun passe la serpillère et son père a retrouvé son sourire.
Ils nous accueillent joyeusement.
« C’est le destin , dit Kun, philosophe, il faut l’accepter et reconstruire. »

Sagesse bouddhiste de qui ne se laisse pas décourager et accepte les coups du sort sans se perdre en lamentations.

Nos bungalows sont intacts et après une indispensable douche nous nous armons nous aussi de balais et de pelles.
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Un peu plus tard nous réussissons à nous connecter sur internet. Et là, c’est le choc.
Les premières images des monstrueux ravages du tsunami à Sumatra, au Sri Lanka, à Pukhet et à Phi Phi, nous sautent aux visages comme des bombes à retardement.
L’horreur.
Les corps emportés par les flots.
Les victimes agrippées aux palmiers, aux toits, aux murs.
L’eau dévastant les rues de Phi Phi.

Si nous avions choisi d’y aller un jour plus tard, Cléo, Néna, Fabio et moi n’aurions pas survécu, et Alberto et ses fils, du haut du promontoire auraient, comme d’autres, assisté impuissants à l’engloutissement du village.

Il suffit parfois d’un détail pour avoir la vie sauve, cela s’appelle la chance.
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En fin d’après-midi nous marchons sur la plage. Les dégâts matériels sont énormes. Heureusement, sur Ko Lanta, il y a moins qu’une dizaine de morts. L’île étant peu construite, l’eau s’est répandue dans les espaces vides.
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Tous les resorts sont déserts, les touristes ont fui, le plus vite possible, créant sur les routes d’immenses embouteillages qui freinent le rapatriement des blessés vers la capitale.
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A Fisherman tout le monde a mis la main à la pâte. Pour remercier ceux qui l’ont aidé, Kun organise un dîner. Personne n’est parti de chez lui, ni les petites anglaises, ni la jeune canadienne, ni nous. Deux copains du maître des lieux, Olivier, un sympathique baroudeur français et Marc, un entrepreneur canadien qui a pris une année sabbatique pour visiter le monde, ont prêté main forte toute la journée, ils sont eux aussi invités.

Ho jongle avec un bâton enflammé et défie Olivier et Marc a un concours de boisson.

Le calme est revenu sur Ko Lanta.
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Commentaires

Les pires situations révèlent les hommes, les lâches mais aussi les courageux et les généreux. Heureusement tous les hommes (au sens large) ne sont pas mauvais.
Quelle tragédie vous avez vécue, aujourd'hui plus personne n'en parle, mais j'imagine que nombre des sinistrés n'ont toujours pas retrouvé leur vie d'avant.

Ecrit par : Dom | 13.12.2006

Il est des moments où des choses terribles ne font que nous frôler, si près, si près .... la chance certainement mais aussi le destin si imprévisible !
Je suppose que l'après n'a pas du être simple à vivre quand vous vous êtes rendus compte ce à quoi vous avez échappé.
En tous les cas je suis heureuse que le destin nous permette de te lire aujourd'hui.

Ecrit par : Sophie Ménart | 13.12.2006

que tu es jeune sur cette photot ! (et sans doute en réalité).
Mais cette fois l'idée de voir des occidentaux dans cette situation de dénuement a facilité la générosité - pour une fois le regard était presque de l'intérieur

Ecrit par : brigetoun | 13.12.2006

A te lire comment ne pas songer à quel point
nous sommes de petites créatures fragiles
dont la vie tient à si peu de choses

Content que tu sois là encore...

Ecrit par : le bateleur | 13.12.2006

je viens de voir sur le DEL que tu ne supportais pas Tintin. Tu es une soeur ! pour Mac Nabb j'essaie de ne pas tomber sur ses écrits

Ecrit par : brigetoun | 13.12.2006

Quelle désolation ! Lecture impressionnante. Ton témoignage me touche davantage que les images que l'on a pu voir à la télé. Tu y étais, et tu es revenue, heureusement.

Ecrit par : tanette | 13.12.2006

Quelle aventure horrible, ça doit marquer, ce genre d'épreuve ..

Ecrit par : amarula | 14.12.2006

Première règle dans la vie : ne jamais prendre l'avion sauf si on veut crever.

Ecrit par : esther | 14.12.2006

merci à toutes et tous de votre visite et de vos coms!

j'ai eu très peur, mais je suis vivante, tellment d'autres n'ont pas eu cette chance!

@coucou Esther

contente que tu sois venue chez moi
tu sais, je préfère mourir en vivant que vivre en m'ennuyant!

Ecrit par : céleste | 14.12.2006

Bonjour,
j'ai vue hier soir un documentaire sur le tsunami et j'avais la gorge nouée..c'est si dur de voir tous ces personnes, ces enfants morts...
Heureusement il y a eu des personnes qui ont pu se sauver, comme toi, mais j'imagine qu'on se pose aussi des questions...
Tous mes voeux pour une meilleure année!

Ecrit par : lory | 15.12.2006

Oggi studio l'italiano con "Assimil" perché un giorno, voglio andare in italia per visitare. E il paese che preferisco nel l'europa perché é bello et perché voglio vedere l'arte e "tutti quanti" ché ho gia studato a "l'università" ma solamente con gli fotografie.

Di piu non e difficile di andare in italia colla macchina o con il treno ! Mi piace molto la cultura feminista che si trova in questo paese. Penso a questo libro che si chiama "Du coté des petites filles" di Elena Gianini Belotti. E una lettura veramente importante ! Sopratutto per gli professori di scuola elementare !
Non capisco perché non e studiato quando i professori sono in formazione.

Che dire di piu ? Si, e un "hors-sujet" (?). Non parlo del "tsunami". Ma tutti gli altri commenti sono fermati ! Non posso niente fare altrove che qui.

Mi piace molto di studiare l'italiano perché e una lingua facile. Ma talvolta io confondo con lo spagnole.
Spéro ché un giorno posso parlare con gli italiani !

Ecrit par : esther | 15.12.2006

Ho un italiano rudimentale ! Dévo utilisare piu di futuro o di condizionale.
Dunque dévo scrivere :
Spero ché un giorno POVERO (il futuro mi sembra) parlare con gli italiani.

(sempre fuori-argomento).
Buona giornatta celesta !

Ecrit par : esther | 15.12.2006

Ciao Esther

Sei brava a scrivere, pero' ci sono degli errori.
Se hai bisogno di aiuto per correggere scrivimi con la mail.
Pardoxalement la culture féministe ( la littérature, romans essais) est importante en Italie, mais dans la société c'est différent.
Par exemple, encore moins de femmes en politique ou chefs d'entreprise qu'en France
Mes amies italiennes, pourtant femmes du Nord, de Bologne, qui est (moins depuis quelques années) une ville d'avant-garde, sont beaucoup plus entravées par les contraintes familiales que mes amies françaises.
Et puis la présence du pape est très forte. Pour les femmes ça n'est jamais bon!


@lory, bonjour et merci



Je crois qu'il est finalement plus angoissant d'imaginer un événement que de le vivre.
Avant ce tsunami j'avais vécu un incendie et certains nombre d'autres épisodes particulièrement difficiles.
Confronté à la réalité, tant qu'on a la possibilité d'agir, la peur est bridée. tout au moins en ce qui me concerne.

J'ai eu plus peur retrospectivement que pendant.


@Brigetoun
Tintin, ce petit bonhomme asexué et ennuyeux!
pour moi illisible
Nabe? à éviter, le plus possible.
Très révélateur, comme Alain Soral, d'un nouvel état d'esprit, qui cherche à "dédiaboliser" l'extrême droite, et pire, à la rendre attrayante
froid dans le dos


grazie e baci a toutes et tous

Ecrit par : céleste | 15.12.2006

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