Voyageuse

Bien que rien dans mon arbre généalogique constitué d’une longue lignée de paysans berrichons ne l’indique, j’ai depuis toujours la conviction d’être la descendante d’un peuple de nomades. Héritière de quelque tribu vagabonde.
La sédentarité m’ennuie, parfois même me pèse. Je n’ai de goût ni pour les maisons ni pour les meubles et mes rares tentatives de jardinage ont rapidement tourné court.
Pour compenser une forme d’immobilité à laquelle, socialement, je suis contrainte, je déménage sans cesse. Pendant les trente dernières années, dix fois, j’ai transporté d’un lieu à l’autre mes maigres possessions, composées essentiellement de vêtements, d’objets hétéroclites et inutiles rapportés de mes voyages et de livres, seuls biens matériels valant à mon sens la peine d’être achetés.
J’ai changé de région, de pays, de métier, navigué entre la France et l’Italie, vécu dans des HLM, des immeubles plus ou moins élégants, des maisonnettes et des villas, fréquenté de très  riches individus et d’autres beaucoup moins, de prétentieux barbants et de gentils fantaisistes, des intellos sérieux et des artistes loufoques, des humbles heureux et des nantis dépressifs (ce qui n’est bien sûr pas une règle). Toutes et tous sont gravés dans ma mémoire. Je me souviens des visages, des sourires, des discussions et des étreintes mais, évanescente libellule (ou pie égoïste, question de point de vue) bercée par la certitude de ne jamais oublier, je néglige trop souvent de me rappeler au souvenir de celles et ceux que j’aime. C’est un tort. Comme les fleurs, l’amitié mérite attention et délicatesse.
Mais toujours de nouvelles rencontres m’enchantent. J’aime être étrangère.

Si mon sens de l’ordre s’est toujours révèle plutôt approximatif dans les différents logements que j’ai occupés à long terme, je suis, par contre, la reine de la valise. Ma technique de rangement, murie au fil des ans, frôle la perfection. Pour un peu, je donnerais des cours !

Durant les longues périodes sédentaires, je m’occupe et virevolte, m’étourdis pour que le temps enfin se déroule et qu’à nouveau l’espace s’ouvre, comme un livre géant que je peux parcourir à ma guise.

Tout ceci en préambule pour vous dire que je rédige ce texte dans une chambre d’hôtel de Kuala Lumpur, capitale de la Malaisie.
Face à moi, les Petronas Towers s’élancent élégamment dans un ciel nuageux. Hier, nous avons exploré la « little India », aujourd’hui, direction China Town.

L’œil aux aguets (l’oreille aussi mais, le malais étant parfaitement incompréhensible, les informations glanées par cette voie le sont aussi), j’observe, je note, je réfléchis.

Le prochain billet traitera vraisemblablement de mode, chiffons, foulards et burqas.

A presto!

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