Pooncholay, Balbina Shop, Madurai

Madurai, Tamil Nadu, Inde le 27 février 2014

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A peine installés à l’hôtel, nous prenons le chemin du temple de Meenakshi, plus précisément, nous allons au marché des tailleurs pour retrouver celle qui pour moi s’appelle « Balbina », une adorable jeune femme qui tient une échoppe d’écharpes.
Nous l’avons rencontrée en 2010 et retrouvée en 2011.
Trois ans plus tard, j’ai hâte de la revoir et j’espère que son petit commerce marche bien.

J’enfile d’un pas rapide l’allée droite du marché, je me souviens exactement de l’emplacement de son échoppe. J’ignore au passage les invitations des tailleurs et autres vendeurs de vêtements et bijoux. Cette année encore ce sera « Balbina » ou rien !

Déception, le stand est toujours là mais il est tenu par un homme âgé.
Je lui demande : « Balbina ? »
Dès qu’il me regarde, son visage s’éclaire d’un vaste sourire. Il me fait signe de le suivre jusqu’à une autre échoppe. Les deux jeunes femmes qui sont derrière le comptoir poussent des exclamations de joie.
Je répète: « Balbina?
My sister, my sister! »
Pendant que l’une d’elle m’attire dans l’échoppe, l’autre me fait signe d’attendre et se précipite dans l’allée.
Rapides comme l’éclair, mes copines commencent à regarder les bijoux en argent et les écharpes exposés.
Puis l’autre jeune femme part elle aussi et nous retrouvons seules dans le stand. Je m’émerveille de cette confiance.

Enfin « Balbina » arrive, toujours aussi belle et souriante. Elle me serre longuement dans ses bras et m’explique que l’homme âgé est son père, que les jeunes femmes sont ses sœurs et que oui, ils nous ont reconnus car notre photo est affichée au mur de la maison familiale.

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Elle explique qu’elle possède désormais trois stands au marché des tailleurs et, surtout, un tout nouveau magasin, Balbina Shop, situé sur l’allée piétonne qui entoure le temple. C’est là qu’elle travaille désormais, avec son mari.
Le chef, c’est elle et elle donne du travail à toute sa famille, sœurs, beaux-frères et belles-sœurs. Elle a repris l’échoppe de tailleur de son père, là où nous l’avons connue, puis peu à peu, a agrandi son entreprise.

Comme j’aime son sourire, sa douceur, sa tendresse !
Son courage aussi, d’être femme et de gérer ses commerces dans un pays où le patriarcat, régnant en maître, contraint beaucoup d’épouses aux tâches ménagères. A Madurai, ville hindouiste traditionnelle, peu d’entre elles travaillent.

Nous l’accompagnons à la boutique. Elle lui coûte très cher et son pari est audacieux.
Vijay, son mari, nous accueille chaleureusement.

Le petit magasin est plein de touristes qui veulent acheter des sarouels (ici on les appelle les « alibaba ») et des tuniques. Elles sont françaises, alors je fais l’article. Oui, oui, ses vêtements sont de bonne qualité, ses prix sont corrects, on peut marchander et elle si gentille, pourquoi acheter ailleurs ?

Ailleurs, ce sont les grands Emporium tenus par les Kashmiris et qui, à Madurai, comme dans tous les lieux touristiques du sud de l’Inde, trustent le commerce de l’artisanat. Balbina Shop est coincé entre leurs magasins et ils le regardent de haut.
Eux travaillent avec les « tour operator ». Des cars entiers de touristes se déversent dans leurs espaces.
Temps minuté. Vite, vite. A peine cinq minutes pour regarder ailleurs. Et « Balbina » les regarde passer, ces clients potentiels trop pressés qui trop souvent ne s’arrêtent pas.

Aujourd’hui, par chance, ce groupe a envahi la boutique. Dans la bonne humeur et en vitesse, des femmes achètent : « alibabas », écharpes, tuniques.

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Dès qu’elles sont parties, nous discutons autour d’un thé.
Les Emporiums ? Une terrible concurrence.
Déloyale.
« Vous, vous faites du business, nous on fait du profit ! » a dit à Vijay le voisin kashmiri.

Et du business, il faut en faire, la boutique coûte très très cher et ses nouveaux propriétaires ne savent pas encore si elle sera rentable.

Je dis une fois encore à quel point je suis heureuse d’avoir retrouvé « Balbina ».
« Oh, you know, me glisse gentiment son mari, elle ne s’appelle pas Balbina, elle s’appelle Pooncholai. Balbina, c’est le nom de la boutique ! »
Oups !

L’après-midi passe, pendant que nos amis visitent le temple, je reste dans la boutique. Nous papotons, les enfants, la famille, choses et autres.

« C’est Meenakshi qui t’envoie, dit Pooncholai, Meenakshi exauce les vœux ! »
Je lui réponds que c’est certainement vrai car, la dernière fois que je suis venue, j’ai pensé très fort à elle en visitant le temple, ensuite, au marché, je ne l’ai pas trouvée mais quand, déçus, nous repartions, nous l’avons croisée dans la rue !

Nous revenons à la boutique le lendemain matin, pour les achats. Six Italiens et deux françaises, du remue ménage, du marchandage, des éclats de rires.
Et les écharpes colorées, soie et pashmina, douces et légères comme des nuages.

Dernier cadeau.

Il faut repartir et les adieux sont émouvants. Pooncholai serre fort ma main dans la sienne, elle et moi avons les larmes aux yeux.
Bien sûr que nous reviendrons, en Juillet peut-être et ils nous inviteront à dîner dans leur maison, là où, depuis des années, trône notre photo.

Merci Meenakshi !

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2 commentaires sur “Pooncholay, Balbina Shop, Madurai”