Italie : La Maison Internationale des Femmes

Je dépeins souvent la société italienne et ses travers. Une longue série d’options politiques et sociales consternantes ont créé un climat de xénophobie, de discrimination qui favorise le sexisme et le racisme. Le malaise croît et la population se divise.
Si la majorité des italiens apporte encore aujourd’hui son soutien à Berlusconi et ses alliés (51%), il existe aussi une opposition réelle qui lutte avec acharnement et lucidité pour défendre  celles et ceux dont les droits sont menacés, niés, piétinés.

Malheureusement, dans un pays où les médias dominants sont sous contrôle, les multiples associations qui agissent au quotidien ont peu de visibilité.

« La Casa internazionale delle donne» (Maison internationale des femmes), située à Rome est née en 1983, créée par un groupe de féministes, dont Edda Billi. Elle regroupe aujourd’hui une quarantaine d’associations unies pour lutter contre la violence envers les femmes, les inégalités et la discrimination.
« Je préfère parler de violence sexiste que de violence sexuelle. Le terme ‘sexuel’ est trop beau pour être ainsi dévoyé » (Edda Billi)

Le texte qui suit a été rédigé et signé par des femmes et les associations de femmes, italiennes et migrantes, qui ont choisi la Maison internationale des femmes comme point de ralliement politique, en tant que lieu habité par des femmes italiennes et migrantes, lieu de rencontre, d’échanges et de mise en place d’initiatives.

“Présenté le 2 février 2009, à la Maison internationale des femmes de Rome, le document a pour but d’ acheminer une coordination d’échanges, d’expériences, d’analyses et d’initiatives autour des  questions des migrantes, la priorité de ce moment .”

” Femmes italiennes et migrantes pour une coordination d’initiatives.

Habiter le monde, s’y sentir « chez soi », un antidote au racisme et au sexisme

Ici, nous nous sentons « chez nous »

Nous dénonçons l’actuelle situation italienne comme une situation d’urgence sociale et démocratique, qui nous menace nous toutes. C’est l’Etat social qui est touché, parce qu’il exclut les immigrées et les immigrés, non seulement sur le plan du travail, acceptant l’exploitation et le travail au noir, mais les exclut également des droits sociaux et civils. Parce que des droits inégaux signifient moins de droits  pour toutes et tous, comme cela se passe aussi pour les suppressions de services sociaux et scolaires, avec la précarité et le chômage.

Les politiques racistes contre l’immigration du gouvernement actuel alimentent des nouvelles formes de racisme populaire, et se confondent avec elles. Il y a désormais trop d’épisodes d’inhumanité et de violence, fondés sur les stéréotypes et préjugés contre « l’étranger et le différent ». Le résultat est une démocratie diminuée, parce que chaque forme de discrimination est le contraire de la démocratie. Ils veulent nous imposer une citoyenneté et donc aussi une société fermées et exclusives, dans laquelle toutes, Italiennes et migrantes, avons du mal à nous reconnaître.

Nous sentons, par ailleurs, l’exigence de reprendre l’analyse et le débat sur le rapport entre les droits universels et les cultures différentes de la culture occidentale, en observant les modalités dans lesquelles le sexisme et le racisme, se combinent pour produire l’injustice, la discrimination et l’exploitation. Il s’agit d’un combinatoire  complexe sur lequel nous devons être vigilants pour que soit affrontée la forme  d’une croissance du racisme, s’il s’agit de femmes étrangères, ou d’une tutelle au nom d’une supériorité supposée de l’Occident. Toujours plus souvent, nous assistons à un usage déviant du féminisme, par l’ethnocentrisme et le colonialisme, pour montrer que « le monstre est hors de nous » et que nous sommes civilisés, alors qu’ils sont sauvages et violents. Il n’agit pas seulement de fausseté : nous les femmes savons bien que la violence contre le genre féminin est un phénomène qui traverse les pays, les cultures, les religions et les strates sociales. Il s’agit d’une ethnicisation absurde d’un crime, et d’un usage très dangereux des politiques identitaires (attribution d’une identité fixée à l’avance, inchangeable, aux femmes occidentales et aux femmes migrantes).

Dans ces années, au contraire, nous avons été nombreuses à travailler pour ouvrir notre pays au monde et à toutes les diversités. Notre « être ensemble », chacune avec sa propre subjectivité, réélaborant ensemble le fait d’être nées en Italie ou ailleurs, nos expériences migratoires et nos différences, est déjà un partage, une alternative venant d’en bas, d’en haut, face au développement d’un nouveau racisme.

Ce que nous ferons
–       Un observatoire culturel sur le racisme en Italie, fait de chroniques et de langages écrits ou parlés (journaux, Internet, radio et télévision)
–       Un observatoire législatif : avec les décrets récents et les projets de loi, le gouvernement est en train de créer un droit inégal pour les étrangers, sur le plan pénal, civil et social, leur rendant quasi impossible le fait de vivre dans notre pays.
–       Un observatoire géopolitique sur les guerres dans le monde – même les massacres au Congo et au Rwanda ont la même origine, l’invention des races et des ethnicités – sur les flux migratoires et sur les conséquences de l’émigration dans les pays d’origine.
–       Nous analyserons les conditions de vie et de travail des femmes italiennes et immigrées : le travail de soin, les nouvelles professions, les nouvelles expériences comme entrepreneuses, mais aussi les anciennes et nouvelles difficultés, en soutenant des projets concrets pour l’amélioration des conditions actuelles.
–       Nous nous engagerons en particulier sur le problème de la santé, parce que la santé des femmes migrantes peut représenter un échantillon de l’état du Service national de Santé tout entier, et du niveau réel de droit à la santé pour tous et toutes. Nous contesterons les propositions de loi actuellement en discussion, à travers lesquelles on veut, de fait, empêcher l’accès au Service national de Santé pour les migrants et les migrantes sans titre de séjour, qui risquent de mettre gravement leur santé en danger.
–       Nous nous engagerons aussi sur un autre grand thème : les expériences interculturelles dans les écoles et dans la société en général, en nous mettant en rapport avec les expériences les plus valables, en soutenant leur propagation dans le territoire et en contestant les propositions qui vont dans un sens opposé, comme les classes séparées pour les enfants étrangers.

Avec qui ?
Avec les institutions disponibles : Communes, Provinces, Régions, ASL, avec d’autres associations et mouvements comme les syndicats.

Comment ?
–       En communiquant à travers des brochures et des tracts qui illustrent en détail les thèmes décrits ci-dessus.
–       En participant à des émissions radiophoniques et télévisées.
–       En réalisant un blog et en communiquant via Internet.
–       En participant à des initiatives antiracistes qui se développent sur notre territoire.
–       En construisant ensemble, natifs et migrants, des projets et des initiatives. Le travail commun, bien que s’articulant sur divers plans, devra donc se baser sur l’attention aux évènements et sur notre capacité  d’analyse et de contestation et en même temps sur le fait de construire des expériences nouvelles et positives, et pour les mettre en réseau.

En somme, « faire société » comme antidote à chaque forme de racisme et de culture discriminatoire. “

Contact :  francescakoch@tin.it

Merci à Myriam qui m’a envoyé ce texte.


Article repris par le site de l’Institut de Recherche et de Formation pour l’avancement des Femmes des Nations Unies.

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